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Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Index of - Free

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« donner au royaume un saint national [et ainsi de] jeter sur la dynastie normande un<br />

lustre nouveau en faisant publiquement reconnaître la sainteté et le pouvoir<br />

thaumaturgique du prince dont Guillaume le Conquérant (…) avait prétendu tenir ses<br />

droits » 19 . Si la création d’un saint « national » et la glorification de la dynastie<br />

apparaissent comme des motifs probables, Bernhard Scholz s’interroge néanmoins sur<br />

l’intérêt que pouvait avoir Henri II à reprendre le projet d’Étienne, dans la mesure où sa<br />

légitimité n’était pas remise en cause comme le fut que celle son prédécesseur. Selon lui<br />

la réponse ne peut être purement politique, mais doit tenir compte des enjeux culturels<br />

et identitaires tels que les expriment les écrits d’Ælred de Rievaulx, qui rédige en 1163<br />

une Vita d’Edward le Confesseur dédiée à Henri II, pour célébrer le transfert des<br />

reliques 20 . Ælred de Rievaulx était un défenseur éminent de la concorde ethnique et de<br />

l’assimilation entre normands et anglais. Dans sa Genealogia Regum Anglorum,<br />

également dédicacée à Henri Plantagenêt, l’abbé cistercien tentait de convaincre le<br />

jeune prince qu’il descendait, par sa grand-mère Edith-Mathilde, de la glorieuse lignée<br />

des rois West saxons 21 . La translation des reliques de saint Edward le Confesseur en<br />

1161 symbolisait ainsi, à ses yeux, l’idée qu’Henri II était la pierre angulaire de la<br />

fusion des peuples normands et anglais, reliant l’Angleterre à la Chrétienté occidentale.<br />

Or, selon B. Scholz, reprenant une expression de Charles Haskins, parce qu’il n’était ni<br />

normand, ni anglais, mais « cosmopolite » 22 , Henri II n’aurait pas eu d’intérêt<br />

authentique pour le culte de son prédécesseur à l’inverse de ce que sera la piété de son<br />

petit-fils Henri III. Mon hypothèse est inverse : c’est précisément parce qu’Henri II était<br />

« cosmopolite » qu’il avait intérêt à favoriser différents cultes, et non pas un seul<br />

exclusivement, afin de renforcer son autorité qui était royale en Angleterre, mais ducale<br />

en Normandie et en Aquitaine. C’est parce qu’il ne fut pas exclusif que le culte<br />

d’Edward le Confesseur ne symbolisait pas effectivement la fusion « ethnique »<br />

conceptualisée par Ælred de Rievaulx. C’est pourquoi, s’il faut considérer qu’Henri II<br />

joua un rôle essentiel dans l’aboutissement du processus de canonisation, comme le<br />

prouve d’ailleurs le déplacement de la cérémonie de translation des reliques jusqu’au<br />

19<br />

BLOCH, M., « La vie de saint Edouard le Confesseur, par Osbert de Clare avec Introduction sur Osbert<br />

de Clare et les premières vies de saint Edouard », dans Mélanges historiques, 1983, p. 948-1030 (citation<br />

p. 953).<br />

20<br />

ÆLRED DE RIEVAULX, The life <strong>of</strong> Saint Edward : king and confessor, 1990, voir aussi PL, 195,<br />

cols. 0737-90; FOLZ, R., Les saints rois du Moyen âge en Occident VIe-XIIIe siècles, 1984, p. 91-101.<br />

21<br />

THOMAS, H. M., The English and the Normans. Ethnic Hostility, Assimilation and Identity, 1066-c.<br />

12, 2003 p. 83-92.<br />

22<br />

HASKINS, C. H., Norman institutions, 1918, p. 156, repris par SCHOLZ, B. W., « The canonization <strong>of</strong><br />

Edward the Confessor », Speculum, 36: 1 (1961), p. 38-60.<br />

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