L'engagement dans les soins infirmiers - Université de Rouen

QUATRIÈME PARTIE – RÉSULTATS ET ANALYSES
par son médecin, il aura encore fallu « trois jours pour que la patiente reçoive
une médication pour l’aider et puis il a fallu attendre un mois et demi pour
qu’on mette en place un deuxième veilleur dans l’unité… (P8) ».
Dans le même ordre d’idées, si la loi sur le travail se doit d’être respectée, les
modalités organisationnelles des institutions vont parfois complètement à son
encontre. C’est le cas dans cette institution qui n’octroie que trente minutes de pause
à son personnel, sachant qu’il lui faut déjà dix minutes à l’aller et dix au retour pour
se rendre à la cafétéria. Pour peu qu’il y ait encore un peu d’attente, la pause est
réduite à néant (E22). Or, en effaçant ces temps de pause, ce sont aussi les temps de
verbalisation qui sont ôtés, élément essentiel au travail et au bien-être du soignant.
La coupe dans ces temps d’échanges a des répercussions négatives, à la fois sur la
prise en charge, puisque le patient est réduit à sa pathologie (T9), mais également sur
les soignants. Comme le dit cette enseignante : « c’est un calcul à court terme… c’est
mauvais pour la santé de l’équipe (T9) ». Une infirmière aux soins à domicile
explique que les petits rapports du matin ont été supprimés, la hiérarchie ayant jugé
que le dossier informatisé permettait la transmission des informations et ôtait toute
nécessité d’échange entre les soignants (P10). C’est nier toute l’importance de la
communication informelle et de la dynamique d’équipe qui se construit et se fortifie
dans ces moments privilégiés. À la communication inter-individuelle, on a substitué
la communication virtuelle (P10).
Ce manque d’échange peut bien vite être la source d’une division, laquelle est
peut-être, d’ailleurs, bienvenue pour une institution qui craindrait des prises de
pouvoir. C’est ce qu’explique ce praticien pour lequel il y a réellement une volonté
des dirigeants de « diviser pour mieux régner », en utilisant pour cela sciemment
certaines techniques de désinformation et de triangulation (P3). Division par ailleurs
encore renforcée par certaines pratiques managériales, comme les primes au mérite
qui font qu’il y a « des gens qui sont en compétition, des jalousies… beaucoup
de difficultés interprofessionnelles (T11) ».
Cette mainmise sur l’équipe est d’autant plus nocive que les collègues restent
une ressource majeure pour pouvoir faire face au stress (P7). Une certaine marge
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