L'engagement dans les soins infirmiers - Université de Rouen

QUATRIÈME PARTIE – RÉSULTATS ET ANALYSES
éclairage théorique spécifique. Plusieurs professionnels déplorent le fait de voir leurs
connaissances théoriques s’amenuiser drastiquement au fur et à mesure de leur
activité professionnelle, alors qu’elles leur seraient de plus en plus nécessaires au vu
de la complexité des situations. Or les enseignants, de leur côté, regrettent de voir
leurs connaissances pratiques s’étioler et se sentent souvent peu pertinents dans ce
domaine, en particulier en regard de l’évolution des pratiques et des techniques. Les
étudiantes se trouvent, quant à elles, dans l’interstice entre le monde de la pratique
soignante et le monde de la théorie qui entoure les soins. Elles vivent mal ce clivage
qui les place parfois dans une posture très inconfortable et qui, de plus, contribue à
renforcer leur difficulté de concevoir le soin comme un tout. Elles ont bien davantage
une vision faite de concepts morcelés, propre à notre système sociétal et à la
défragmentation des différents espaces qui le composent (Chauvière, 2011), et de
représentations parfois divergentes qui empêchent la construction de la cohérence.
La pratique réflexive, en reliant les différents savoirs, constitue aussi le moyen de
réduire leur niveau d’abstraction par la mise en relation avec la pratique. Elle
favorise l’articulation entre les apports théoriques et l’application pratique (Barbier,
2004), et permet à l’étudiante de favoriser cette construction complexe utile à sa
profession.
Il y a donc lieu de revaloriser l’expérience et l’apprentissage expérientiel comme le
souhaitent enseignants et praticiens, mais il est également nécessaire de nourrir cette
expérience avec la substance théorique qui permet son émancipation et de l’inscrire
dans un réseau conceptuel plus global. Les praticiens ont, à plusieurs reprises,
évoqué la souffrance de ne pas avoir le temps de prendre de la distance, en
particulier dans des situations complexes (P3, P10). Cette distanciation critique aurait
comme grand avantage d’aider le soignant à pouvoir profiter des expériences
passées, aussi ardues soient-elles, pour affronter celles à venir avec davantage de
sérénité.
Permettre de faire face à la complexité croissante des tâches
La pratique réflexive constitue aussi une réponse, comme nous le voyons au point
cinq de la liste exposée par Perrenoud (2001), à la complexité croissante des
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