L'engagement dans les soins infirmiers - Université de Rouen

QUATRIÈME PARTIE – RÉSULTATS ET ANALYSES
politique, puisque cette dernière est, selon nous, davantage en lien avec le processus
relativement récent de professionnalisation des soins infirmiers.
Ouvrir à la coopération avec les collègues
En revanche, nous mettrons un accent tout particulier à ce point de la coopération
qui, dans les soins infirmiers, relève à notre avis encore davantage d’une co-
construction que d’une coopération. C’est une profession qui est à construire
collectivement. Cette « délibérative collective », qui constitue selon Savadogo
(2008, p.78), « la démarche la plus adéquate pour apprécier les principes de
l’action humaine », revêt une importance particulière à plusieurs niveaux. D’une
part, la pratique soignante se caractérise par une diversité de pratiques et de
spécialités très vaste. Le lien est donc d’autant plus important à consolider et à
intensifier entre les différents secteurs. D’autre part, la pratique, avec les innovations
technologiques d’un côté et les modifications structurelles et économiques de l’autre,
poursuit des objectifs souvent différents de la dimension scientifique plus présente
dans les milieux de la formation. Il s’ensuit un écart grandissant entre les actes de la
pratique et les contenus de la formation qui porte préjudice à la profession dans son
ensemble. Il est donc essentiel d’engager le collectif dans une démarche commune et
une co-construction de l’identité, par delà les frontières qui séparent les mondes de la
formation et de la pratique (P8, P10, T9, T15). C’est ce qui permet d’empêcher que ce
collectif ne soit réduit à une somme d’individus exposés à l’isolement, mais privés,
dans les faits, du réel collectif de travail (Clot, 2008). Il est essentiel pour des
collègues de pouvoir prendre du temps pour avoir des dialogues véritables, des
mises en commun et des débats qui ne soient pas de simples temps d’échanges
d’informations, comme peuvent l’être les rapports des soignants lors des
changements d’équipes. Ces échanges reconnus comme essentiels tendent de plus en
plus à être réduits au strict minimum, alors que le soignant tout comme le soigné
demeurent des sujets dotés d’une parole consciente et constructrice. Les soignants
ont besoin d’expérimenter une solidarité qui peut « servir d’exutoire au caractère
anxiogène de l’activité ou du moins à sa charge mentale… en arrachant
l’individu à une épreuve solitaire » (Osty, 2003, p.219).
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