L'engagement dans les soins infirmiers - Université de Rouen

QUATRIÈME PARTIE – RÉSULTATS ET ANALYSES
conscience ici du caractère multifocal de cette réflexion et du cheminement important
qu’elle sous-entend. Elle doit, par conséquence, être amorcée dès le début de la
formation et en constituer une trame centrale tout au long du cursus d’études.
Avec la disparition progressive de l’influence de la science médicale sur la
profession soignante et l’amplification, chez cette dernière, de ses rapports avec les
disciplines connexes, elle est appelée à clarifier sa propre définition ainsi que son
identité. Si elle est en mesure d’affirmer cette identité, la profession soignante ne peut
alors que tirer profit des apports de ces disciplines voisines, des apports qui,
conjugués avec ceux des sciences infirmières, contribuent à édifier cette profession en
participant à son ossature conceptuelle et en lui conférant simultanément un système
d’intelligibilité interne, mais également externe.
Certes les soins infirmiers sont une profession centrée sur une pratique, mais
cette pratique ne naît pas de nulle part, elle est ancrée dans une conception de
l’humain qui lui donne vie, et elle s’inscrit dans une dimension résolument collective.
C’est pourquoi il serait erroné de s’enliser dans le seul registre du savoir, qui plus est
d’un savoir individuel. Si le consensus autour d’un corpus de connaissances
spécifiques est nécessaire à la définition identitaire de la profession, des moments de
réflexion et d’échanges, entre les infirmiers et infirmières de différents secteurs et de
différents horizons, en particulier des mondes de la formation et de la pratique, sont
comme autant de faisceaux de motivations dynamiques qui se potentialisent dans un
processus itératif, pour finalement permettre le développement d’une identité
partagée, modelée par une élaboration commune de sens, comme signification de
l’action collective dans l’histoire.
Il y a fort à parier que la difficulté actuelle des soignants dans l’affirmation de
leur identité provient d’un déséquilibre entre une conception du soin très largement
imputée au registre de l’action et de la technique, conception renforcée par la
rationalisation actuelle, et une conception comme expression du souci de l’Autre, de
l’humain et de sa place. Le système, froid et quelque peu machiavélique, voit
l’individu transformé en simple « force de travail ». A l’entraide et à la solidarité se
substituent de plus en plus souvent la négociation entre les détenteurs de ressources
stratégiques.
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