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texto y sociedad en las letras francesas y francófonas

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de les interroger <strong>en</strong> les confrontant 9 . » Suivant cette idée, l’omniprés<strong>en</strong>ce des brand<br />

names dans la narration houellebecqui<strong>en</strong>ne serait – contrairem<strong>en</strong>t à ce qui a été avancé<br />

précédemm<strong>en</strong>t – loin d’être gratuite : bi<strong>en</strong> plus qu’un simple détail secondaire, destiné à<br />

sceller l’ « illusion référ<strong>en</strong>tielle », le r<strong>en</strong>voi constant à des griffes commerciales, pour<br />

r<strong>en</strong>dre compte du réel, témoignerait d’une mutation profonde de l’imaginaire<br />

contemporain. Mais quelle serait l’origine de ce changem<strong>en</strong>t de paradigme ? Comm<strong>en</strong>t<br />

expliquer cette incrustation de la rhétorique publicitaire au sein du langage courant ?<br />

Pourquoi un personnage comme le héros de Plateforme, pourtant indiffér<strong>en</strong>t à la société<br />

de consommation, ne peut-il faire autrem<strong>en</strong>t que de relever systématiquem<strong>en</strong>t les<br />

marques des objets qui l’<strong>en</strong>tour<strong>en</strong>t ?<br />

L’essai No Logo, de la journaliste canadi<strong>en</strong>ne Naomi Klein, offre quelques pistes<br />

d’interprétation intéressantes à ce sujet. En effet, cette étude est consacrée au<br />

phénomène publicitaire du branding – soit la valorisation d’une marque plutôt que d’un<br />

produit – et des répercussions socioculturelles qu’une telle pratique a pu créer. D’après<br />

Klein, au cours des années 1990, où l’économie occid<strong>en</strong>tale tournait au ral<strong>en</strong>ti et où ont<br />

comm<strong>en</strong>cé à apparaître de plus <strong>en</strong> plus de produits dégriffés – versions anonymes et<br />

économiques de marchandises existantes –, certaines compagnies visionnaires (« the<br />

Nikes and Microsofts, and later the Tommy Hilfigers and Intels 10 »), plutôt que de<br />

sabrer elles-mêmes leurs prix pour rejoindre cette compétition par le bas, ont misé sur<br />

une stratégie inédite : faire mousser la marque elle-même, de manière à ce que le désir<br />

du consommateur ne soit plus ori<strong>en</strong>té vers le produit proposé – désormais disponible<br />

sous forme de copie à rabais –, mais bi<strong>en</strong> sur la griffe <strong>en</strong> soi. « What these companies<br />

produced primarily were not things […], but images of their brands. Their real work lay<br />

not in manufacturing but in marketing 11 . » De fait, si, depuis la révolution industrielle,<br />

époque à laquelle elle a été inv<strong>en</strong>tée, la publicité a eu pour principale fonction de<br />

conférer une spécificité à des marchandises que la production de masse r<strong>en</strong>dait<br />

similaires, d’un fabricant à l’autre, un siècle et demi plus tard, une telle logique se voit<br />

poussée à son paroxysme, dans la mesure où cette id<strong>en</strong>tité commerciale <strong>en</strong> vi<strong>en</strong>t à<br />

supplanter le produit lui-même : « The old paradigm had it that all marketing was<br />

selling a product. In the new model, however, the product always takes a back seat to<br />

the real product, the brand, and the selling of the brand acquired an extra compon<strong>en</strong>t<br />

9 Ibid., p. 17.<br />

10 Naomi Klein (2000), No Logo, Toronto, Vintage Canada, p. 4.<br />

11 Idem.<br />

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