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texto y sociedad en las letras francesas y francófonas

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francaise, la force de l’éducation, puisque il est dev<strong>en</strong>u instituteur, au grand scandale de<br />

son père qui pronait le respect des traditions ancestrales. Le père de Maissa Bey est mort<br />

pour donner vie une seconde fois à la petite fille qu’elle était, pour lui donner les ailes<br />

qui allai<strong>en</strong>t la libérer. La mort prématurée de ce père idéalisé l’a auréolé d’un prestige<br />

imm<strong>en</strong>se, mais l’a aussi empeche de se heurter à la jeune femme qui apparaissait sous la<br />

petite fille assexuée. La femme qu’il a épousée, malgré son éducation, ne pourra jamais<br />

etre son égale. Lui aussi a <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>u chez elle les sil<strong>en</strong>ces. Son souv<strong>en</strong>ir aurait-il été le<br />

même si il avait vécu plus longtemps? Ce père sera très différ<strong>en</strong>t de ceux décrits dans<br />

Bleu, Blanc, Vert, abs<strong>en</strong>ts, eux, mais par choix.<br />

L’oeuvre de Maissa Bey est ancrée dans le réel, comme toute la littérature de cette<br />

époque troublée. La vision de la société que Maissa Bey propose s’inscrit dans une<br />

forme de littérature de combat qui dérange par bi<strong>en</strong> des aspects. Fille d’un instituteur<br />

militant nationaliste, elle-même professeur de français <strong>en</strong> Algérie, écrivaine postcoloniale,<br />

Maissa Bey nourrit et rev<strong>en</strong>dique une filiation avec l’anci<strong>en</strong>ne culture<br />

coloniale qui a marqué selon elle le psyché national et doit participer au métissage. La<br />

société qu’elle décrit ne peut ne pas avoir été imprégnée de l’expéri<strong>en</strong>ce de c<strong>en</strong>t tr<strong>en</strong>te<br />

années de culture coloniale. La France est <strong>en</strong>core prés<strong>en</strong>te <strong>en</strong> la figure t<strong>en</strong>dre mais<br />

presque surréelle d’une vieille Française restée là après l’indép<strong>en</strong>dance. Tous les livres<br />

français sont <strong>en</strong>core là dans des appartem<strong>en</strong>ts vidés, offerts à la curiosité de la jeune<br />

fille. Elle fait souv<strong>en</strong>t référ<strong>en</strong>ce à Camus. La mer, le soleil, la casbah, le douar, la baie<br />

d’Alger form<strong>en</strong>t chez elle aussi, dans un style sobre, un décor exotique melé d’une<br />

grande poésie. Comme chez Camus, son oeuvre parle de solitude, de solidarité,<br />

d’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t. Elle est aussi l’hértière de nos écrivains c<strong>las</strong>siques, Hugo <strong>en</strong> particulier,<br />

dans sa vision poétique maniché<strong>en</strong>ne de la société, la dénonciation de ses maux et son<br />

espoir pour une société plus morale et équitable. Elle est l’héritière de Baudelaire dans<br />

sa riche interprétation poétique du thème de l’angoisse. Comme Malika Mokeddem,<br />

l’auteur de l’Interdite qui ressemble tellem<strong>en</strong>t à ses héroines, Maissa Bey rev<strong>en</strong>dique la<br />

langue française, “butin de guerre”, mais aussi sa filiation avec tous les rebelles du<br />

monde littéraire francophone auquel elle apparti<strong>en</strong>t. Ard<strong>en</strong>te nationaliste, anticolonialiste<br />

de la jeune génération post-coloniale, Maissa Bey fair le bilan de ce que la<br />

France lui a légué et dont elle ne veut ou ne peut se départir: une langue que lui a fait<br />

aimer son père instituteur, alors que lui-même est mort sous la torture des soldats<br />

français, des livres qui lui ont <strong>en</strong>seigné la force des rêves et le devoir de rebellion.<br />

Langue et littérature font partie de son histoire et elle <strong>en</strong> rev<strong>en</strong>dique l’héritage, ce qui <strong>en</strong><br />

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