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texto y sociedad en las letras francesas y francófonas

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Géographie culturelle de l’Europe <strong>en</strong>tre-deux-guerres<br />

Mais peut-on déf<strong>en</strong>dre aujourd’hui l’idée d’une mémoire littéraire europé<strong>en</strong>ne<br />

commune ? La mémoire littéraire, non l’histoire, peut-elle fonder une id<strong>en</strong>tité<br />

europé<strong>en</strong>ne – mémoire à la Montserrat au relief compliqué ? Cela rappelle la vieille<br />

question du Panthéon littéraire europé<strong>en</strong>. Au fronton des bibliothèques du XIX e siècle,<br />

quels écrivains inscrire, notamm<strong>en</strong>t pour la France ? Le problème est familier, la<br />

littérature française, dans sa continuité, n’a pas d’écrivain à placer dans un canon<br />

europé<strong>en</strong> des prophètes littéraires, auprès de Dante, Shakespeare, Cervantès, Goethe et<br />

parfois Pouchkine.<br />

La question s’est de nouveau posée durant l’<strong>en</strong>tre-deux-guerres, dans les années<br />

1920 de la réconciliation franco-allemande, à la recherche d’une culture europé<strong>en</strong>ne<br />

commune. Et il est éclairant d’observer comme elle a été alors traitée. En 1929, Albert<br />

Thibaudet montre son actualité dans sa chronique de la NRF, justem<strong>en</strong>t intitulée « Pour<br />

la géographie littéraire » : « André Gide, interrogé à Berlin par un rédacteur de la<br />

Literarische Welt, sur le Français qui lui paraissait susceptible, pour l’humanisme<br />

général, d’un rôle gœthé<strong>en</strong>, répondit : Montaigne 5 . C’était le mom<strong>en</strong>t où M. Paul<br />

Souday consacrait p<strong>en</strong>dant près d’un mois son rez-de-chaussée mercurial aux<br />

publications réc<strong>en</strong>tes sur Victor Hugo et concluait une fois de plus que le Poète de l’Arc<br />

de Triomphe et du Panthéon occupe dans la littérature française, conçue à la manière<br />

d’un rond-point, la situation de ces monum<strong>en</strong>ts sur leur place 6 . Voilà une occasion de<br />

rectifier une fois de plus une c<strong>en</strong>tromanie pat<strong>en</strong>te chez M. Souday, larvée chez André<br />

Gide, et qui, sous l’une et l’autre de ses formes, me paraît égalem<strong>en</strong>t contraire au génie<br />

et à l’élan de la littérature française 7 . »<br />

Suivant le cliché, chaque littérature nationale est représ<strong>en</strong>tée par un écrivain<br />

souverain, mais la littérature française est pénalisée par l’abs<strong>en</strong>ce d’un être suprême<br />

dont graver le nom au fronton. Qui mettre ? Montaigne ou Hugo ? Ou <strong>en</strong>core Molière ?<br />

Thibaudet, <strong>en</strong> bon élève de Bergson, refus cette réduction à l’unique.<br />

5<br />

C’est Walter B<strong>en</strong>jamin qui avait interrogé Gide sur l’influ<strong>en</strong>ce de Goethe pour un article non signé du<br />

Literarische Welt du 1 er février 1929.<br />

6<br />

En janvier-février 1929, le feuilleton de Souday dans Le Temps porta sur des publications réc<strong>en</strong>tes sur<br />

Hugo.<br />

7 er<br />

« Pour la géographie littéraire », NRF, 1 avril 1929, in Réflexions sur la littérature, Paris, Gallimard,<br />

« Quarto », 2007, p. 1277-1279.<br />

6

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