UNESCO. General Conference; 30th; Records ... - unesdoc - Unesco

27.23 En matière de culture, vous avez manifesté votre approbation pour l'évolution qui - sans délaisser le
patrimoine mondial au sens classique du terme, puisque, au contraire, vous recommandez d'en étendre la liste -
met de plus en plus l'accent sur le patrimoine immatériel. Le concept de patrimoine s'étend donc désormais à tous
ces faits de culture qui se transmettent comme la vie, par la vie, avec la vie - les langues, les traditions, les arts,
les coutumes, etc. Par ce biais, nous accédons non pas seulement aux vestiges de créations passées, mais au
principe même de toute création, et travaillons à transmettre aux générations futures l'empreinte de notre
présence et la ressource de leur propre expression à venir. J'ajoute que cette vitalité culturelle, que nous nous
proposons de fortifier partout et sous toutes ses formes, revêt deux caractères qui en font un outil décisif de
développement, à savoir, d'une part, une valeur quasiment éthique d'affirmation de soi, de manifestation d'une
dignité, dont nous savons qu'elle est à la racine de tout développement durable et authentique ; d'autre part, une
évidente valeur économique, puisque, en un temps où le tourisme est devenu la première industrie mondiale, la
qualité de l'environnement culturel et social prend de plus en plus d'importance dans la valorisation des sites
autour desquels s'organise ce flux, constituant un atout de développement particulièrement appréciable.
27.24 Permettez-moi enfin de relever combien le domaine de la culture tend à redevenir l'un des atouts
fondamentaux de notre Organisation, de pair avec l'éducation, dans le contexte des débats engagés autour de la
libéralisation du commerce mondial. Plusieurs pays, notamment la Turquie, se sont fait l'écho des préoccupations
de tous en matière de protection des éléments du patrimoine et des œuvres d'art dans ce contexte. Le maintien de
la diversité des expressions et des productions culturelles devient aujourd'hui le lieu même du débat de fond sur
la mondialisation, et l'enjeu d'un projet de civilisation pour notre temps. Vous avez à juste titre voulu clairement
que l'UNESCO soit dans ce domaine au premier rang de ce qui est, pour l'avenir, un combat fondamental. La
réunion des ministres de la culture restera à cet égard comme un moment fort de la présente session. Elle s'est
clairement exprimée. Je suis sûr que l'Organisation mondiale du commerce aura entendu son message. Il faut que
l'UNESCO continue d'examiner en profondeur tous les aspects de la question. Nous devons faire admettre la
spécificité des produits culturels, de ces produits qui reflètent la capacité de création des êtres humains.
27.25 La communication et plus particulièrement les enjeux de la société de l'information constituent un autre
domaine crucial pour l'action et l'avenir de l'UNESCO, tout simplement parce que c'est là que se jouent une
bonne partie de tous ses autres domaines de compétence. Nous devons à la fois aider à résorber les écarts entre
les "inforiches" et les "infopauvres", qui sont par nature exponentiels, et agir au sein du cybermonde qui tend à
devenir le coeur de notre avenir, pour en analyser la nature et les évolutions, proposer des modalités, dénoncer
les dérives, sans jamais négliger tout le reste de l'univers de la communication que sont la presse, la radio, la
télévision. Dans ces domaines, l'UNESCO exerce une mission de vigilance et une responsabilité normative
constitutionnelle en matière de liberté de l'information et de libre circulation des idées, et je suis particulièrement
heureux que ceci ait été réaffirmé, avec force, pendant vos débats en plénière.
27.26 Notre responsabilité dans le domaine des sciences tend elle aussi à croître : la Conférence de Budapest,
dernière en date des grandes conférences par lesquelles nous avons refondé les bases de notre action dans tous les
domaines, a bien mis en relief la dimension éthique qui désormais accompagne tout le développement
scientifique, dès lors qu'il touche, réellement ou potentiellement, par excès ou par défaut, par action ou par
omission, aux principes, aux conditions et aux formes de la vie sur terre. C'est dire si le développement des
sciences exactes, sur lequel repose de plus en plus l'édifice de notre destin, doit nécessairement se conjuguer avec
un progrès peut-être plus rapide encore dans la connaissance de l'homme et des sociétés, qui incombe aux
sciences humaines et sociales. Le problème central de la gouvernance, qui conditionne la plupart des possibilités
de développement ainsi que l'évolution harmonieuse des sociétés, repose sur une connaissance et une
compréhension des sociétés, que leur évolution rapide impose de sans cesse renouveler. A cet égard, il incombe à
l'UNESCO de prêter main-forte aux décideurs, qui portent sur leurs épaules la responsabilité de cette
gouvernance, en mettant à leur disposition des éléments d'appréciation fondés sur les résultats de la recherche et
présentant toute la rigueur scientifique voulue.
27.27 Dans ces divers domaines, Madame la Présidente, l'UNESCO peut en effet contribuer à un
éclaircissement scientifique, technique, des problèmes et enjeux du monde contemporain. Mais la vraie portée de
l'UNESCO est d'être une instance de formulation de politiques et d'exigence politique collective envers chacun
de ses membres. Rien ne se fera de bon sans une volonté politique réelle, je le soulignais tout à l'heure, c'est-àdire
qui se donne des moyens et des objectifs.
27.28 De ce point de vue, je constate avec beaucoup de satisfaction que, de session en session, la Conférence
générale manifeste une volonté toujours plus ferme de traduire en actes les résolutions qu'elle adopte et qui vont
bien plus loin que la seule conduite des actions du Secrétariat. Je me réjouis des effets heureux que cette
mobilisation générale produit dans tous nos domaines de compétence, et dont de nombreux orateurs ont cité des
exemples remarquables.
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