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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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CARACTÈRES, PORTRAITS ET NOUVELLES<br />

AU TOURNANT DES LUMIÈRES<br />

Au sein <strong>de</strong> la littérature éducative et édifiante qui s’épanouit à la fin du XVIII e<br />

siècle et au début du siècle suivant, plusieurs titres d’ouvrages font directement<br />

référence <strong>aux</strong> Caractères <strong>de</strong> <strong>La</strong> Bruyère. Une première raison peut être avancée :<br />

celle d’une option commune pour ces moralistes <strong>de</strong> second ordre qui, à la suite<br />

<strong>de</strong> l’illustre <strong>de</strong>vancier du grand siècle, enten<strong>de</strong>nt modifier leurs jeunes lecteurs,<br />

servir <strong>de</strong> gui<strong>de</strong> <strong>aux</strong> parents et pédagogues qui les liront, en s’appuyant sur un<br />

tableau fidèle <strong>de</strong>s mœurs <strong>de</strong> leur temps. Ainsi, la visée moraliste (et non moralisante,<br />

à la différence <strong>de</strong>s lectures négatives qui seront faites plus tardivement par<br />

les historiens <strong>de</strong> la littérature à l’usage <strong>de</strong>s enfants) est soulignée pour Berquin<br />

par son ami et biographe, Nicolas Bouilly : «␣ le nom <strong>de</strong> Berquin était parvenu au<br />

plus haut rang parmi les moralistes mo<strong>de</strong>rnes 1 ␣ ». Pour les autres auteurs qui formeront<br />

notre corpus dans cette étu<strong>de</strong>, la référence à <strong>La</strong> Bruyère est directement<br />

inscrite dans les titres qu’ils adoptent 2 . Qu’on en juge : <strong>de</strong> M me ␣ <strong>de</strong> Genlis, qui<br />

rayonne sur la littérature édifiante <strong>de</strong> la fin du siècle au Second Empire par le<br />

biais <strong>de</strong>s rééditions, on relève Le petit <strong>La</strong> Bruyère, ou Caractères et mœurs <strong>de</strong>s enfants<br />

<strong>de</strong> ce siècle, ouvrage fait pour l’adolescence, suivi d’une secon<strong>de</strong> partie contenant un<br />

recueil <strong>de</strong> pensées diverses (Paris : Maradan, 1801) ; Le <strong>La</strong> Bruyère <strong>de</strong>s domestiques,<br />

précédé <strong>de</strong> considérations sur l’état <strong>de</strong> domesticité en général et suivi d’une <strong>nouvelle</strong><br />

(Paris : Thiercelin, 1828). À ces ouvrages, nous ajoutons celui <strong>de</strong> M me ␣ Mallès, née<br />

<strong>de</strong> Beaulieu, autre auteur à succès 3 , Le <strong>La</strong> Bruyère <strong>de</strong>s jeunes <strong>de</strong>moiselles, ou Princip<strong>aux</strong><br />

caractères <strong>de</strong>s jeunes personnes (Paris, P.␣ Blanchard, 1821) 4 et enfin L’ami <strong>de</strong>s<br />

enfants <strong>de</strong> Berquin 5 . Les titres se caractérisent par la présence explicite <strong>de</strong> la référence<br />

culturelle, <strong>La</strong> Bruyère, ses Caractères, ainsi que par <strong>de</strong>s formules d’adaptation,<br />

qui visent l’âge et l’état <strong>de</strong>s <strong>de</strong>stinataires. Une problématique se <strong>de</strong>ssine :<br />

celle d’une intertextualité revendiquée avec un texte-source qui sera nécessairement<br />

modifié par les buts nouve<strong>aux</strong> que s’assignent nos auteurs. Les paratextes<br />

développent leurs intentions et précisent leurs positions par rapport au modèle<br />

moraliste du XVII e siècle. M me ␣ <strong>de</strong> Genlis, qui est l’auteur d’une réédition partielle<br />

<strong>de</strong>s Caractères <strong>de</strong> <strong>La</strong> Bruyère en 1812, justifie et analyse sa <strong>de</strong>tte à l’égard <strong>de</strong>s<br />

moralistes du siècle précé<strong>de</strong>nt dans sa préface du Petit <strong>La</strong> Bruyère :<br />

[…] un livre <strong>de</strong> maximes et <strong>de</strong> portraits manquait [<strong>aux</strong> enfants] (p.␣ 7).<br />

Le meilleur <strong>de</strong> tous les observateurs, le plus profond, le plus parfait moraliste, l’écrivain<br />

le plus piquant et le plus original est, à mon gré, <strong>La</strong> Bruyère. Afin <strong>de</strong> justifier le<br />

titre que j’ai donné à cet essai, j’ai tâché <strong>de</strong> saisir le ton et d’imiter la manière <strong>de</strong> mon<br />

auteur bien-aimé : j’ai pris ou parodié les titres <strong>de</strong> ses chapitres, mais ne pouvant dire<br />

aussi bien, j’ai dit <strong>de</strong>s choses absolument différentes, c’est un grand peintre qu’il est

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