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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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26<br />

LES PIÈCES LIMINAIRES DES RECUEILS DU XVI e␣ SIÈCLE<br />

rents. Ceux qui figurent à l’entrée <strong>de</strong> l’Esté émanent <strong>de</strong> signataires appartenant<br />

au milieu juridique auquel s’i<strong>de</strong>ntifie l’auteur, licencié en droit. On trouve ensuite<br />

<strong>de</strong>ux épitaphes, l’une en latin, l’autre en français en l’honneur <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong><br />

l’auteur 19. L’évocation d’intimes <strong>de</strong> Poissenot n’est pas sans faire penser <strong>aux</strong> sonnets<br />

liminaires du Printemps <strong>de</strong> Jacques Yver, adressés par Joseph son frère et Marie,<br />

sa sœur 20.<br />

Pour leur part, les poèmes qui figurent en paratexte <strong>de</strong>s Nouvelles histoires tragiques<br />

<strong>de</strong> Poissenot 21, et semblent parvenir <strong>de</strong> connaissances <strong>de</strong> l’auteur – parmi<br />

lesquels <strong>de</strong>s avocats – ne sont pas tous i<strong>de</strong>ntifiables. Ce qui est évi<strong>de</strong>nt, c’est leur<br />

intention <strong>de</strong> situer le registre du recueil en faisant se succé<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s vers en grec,<br />

latin et français, dont le niveau lexical ainsi que les allusions à la mythologie<br />

sont un indice certain d’élitisme. Un quatrain en latin, signé par Chasteaubrun,<br />

l’un <strong>de</strong>s trois compagnons <strong>de</strong> l’Esté, tient à marquer la différence <strong>de</strong> niveau entre<br />

ce recueil <strong>de</strong> «␣ badinages␣ » et la présente collection. L’un <strong>de</strong>s sonnets évoque<br />

«␣ <strong>de</strong>ux rares pince<strong>aux</strong>␣ », c’est-à-dire Boaistuau et Belleforest 22.<br />

Les poèmes qui précè<strong>de</strong>nt le Théâtre du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> Boaistuau mettent eux aussi<br />

en présence ces «␣ <strong>de</strong>ux riches thesauriers <strong>de</strong> la <strong>langue</strong> françoise␣ » comme les appelle<br />

Jacques Yver dans l’épître au lecteur du Printemps 23. <strong>La</strong> qualité <strong>de</strong>s signataires<br />

<strong>de</strong>s six poèmes, parmi lesquels Baïf et Belleforest, porte témoignage <strong>de</strong> celle<br />

du texte et <strong>de</strong> son auteur 24.<br />

Le barrage <strong>de</strong>s onze poèmes à l’entrée <strong>de</strong> la Nouvelle fabrique <strong>de</strong>s excellents traicts<br />

<strong>de</strong> verité <strong>de</strong> Philippe d’Alcripe donne une tout autre impression. Indépendamment<br />

du fait que l’auteur – qui se masque sous <strong>de</strong>s pseudonymes – a produit là<br />

œuvre indigne <strong>de</strong> son état <strong>de</strong> moine <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> Mortemer, il fallait justifier la<br />

nature récréative <strong>de</strong> ce type d’ouvrage. Plusieurs <strong>de</strong>s pièces s’adressent à d’éventuels<br />

détracteurs, le topos <strong>de</strong>s «␣ médisants␣ » étant ici à prendre au sérieux 25. En ce<br />

cas, les «␣ fortifications␣ » liminaires agissent bien comme stratégies <strong>de</strong> justification<br />

tout autant que <strong>de</strong> présentation du contenu qui va suivre. Comme déjà chez<br />

Rabelais, il serait inapproprié <strong>de</strong> dissocier les poèmes <strong>de</strong>s autres éléments du<br />

paratexte. Dans les trois premiers livres <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier, prologues et dizains contribuent<br />

ensemble à l’élaboration du sens, celle-ci ne pouvant se concevoir qu’à<br />

travers une véritable interaction avec les lecteurs n’excluant d’ailleurs pas la polémique<br />

26.<br />

On observe, d’un recueil à l’autre, la mise en place d’une sorte <strong>de</strong> schéma canonique<br />

<strong>de</strong> l’appareil liminaire comprenant les éléments suivants : poèmes, épître<br />

dédicatoire, avertissement au lecteur et table ou sommaire du contenu 27. Les<br />

adresses au lecteur peuvent se dédoubler en épître et avertissement, comme dans<br />

les Nouve<strong>aux</strong> récits ou contes moralisez <strong>de</strong> Romannet du Cros. Dans la première, il<br />

justifie la légèreté <strong>de</strong> ses propos par la moralisation qu’il va en faire ; dans le<br />

<strong>de</strong>uxième, il authentifie ses récits, dans une variante <strong>de</strong> l’allégation <strong>de</strong> vérité :<br />

«␣ Je n’ay rien escrit en ce livre sinon ce que j’ay congneu ad unguem␣ ». Il y explique<br />

aussi son choix <strong>de</strong> l’expression «␣ nouve<strong>aux</strong> récits␣ » plutôt qu’histoires nou-

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