La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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NOUVELLES DU XX e SIÈCLE : DE L’ANTHOLOGIE AU RECUEIL
NOUVELLES DU XX e SIÈCLE :
DE L’ANTHOLOGIE AU RECUEIL.
STRUCTURES D’ORGANISATION
DU LIVRE DE NOUVELLES
Centrées sur la question du recueil au XX e siècle, les réflexions qui suivent
visent à analyser, dans une perspective synchronique, la structure et l’organisation
du livre de nouvelles à partir d’œuvres d’écrivains qui, nouvellistes d’exception
ou de profession, ont fait dans leur production littéraire une place à l’art de
la brièveté. Drieu La␣ Rochelle, Valery Larbaud, Jean Giono, Jacques de Lacretelle,
André Maurois, Paul Morand, Jean-Paul Sartre, J.-M.␣ G. Le Clézio, Jean-Pierre
Martin… viendront illustrer ce qui nous semble répondre à l’attitude du nouvelliste
contemporain de concevoir son œuvre comme un ensemble organisé. Dominante
d’une époque, signalée déjà par René Godenne dans son étude sur la
nouvelle française 1 , qui marque le passage de l’anthologie au recueil, c’est-à-dire
de la réunion plus ou moins arbitraire de textes épars, à la construction d’un
ensemble cohérent, dont le sens est à chercher dans l’articulation et le jeu des
relations intertextuelles. Dans cet ensemble, chaque nouvelle constitue en effet
un tout, mais il y aura toujours, entre les différents textes, une relation que le
nouvelliste viendra souligner par le traitement d’une même thématique le long
du livre, ou la présentation d’un même personnage. Certains auteurs accentuent
encore plus leur intention de faire un tout homogène, dont l’unité se manifeste à
travers tout un réseau de métaphores et de symboles.
L’intention de faire cohérent se révèle déjà dans cette première instance de
communication qu’est le titre du livre. À côté de la tendance la plus générale
consistant à désigner tout le volume par le titre de l’une de ses nouvelles (cas de
Journal d’un homme trompé de Drieu La␣ Rochelle, Amants, heureux amants… de
Valery Larbaud ou Solitude de la pitié de Jean Giono 2 ), on constate aussi l’emploi
d’un titre général qui ne coïncide avec aucune des nouvelles du recueil, procédé
qui viendrait accentuer l’organisation et la structure cohérentes du livre. Les œuvres
de Joseph Kessel, Jacques de Lacretelle ou Charles Plisnier illustrent cette deuxième
tendance. Dans La steppe rouge 3 , Kessel présente une série de personnages victimes
des conséquences de la révolution russe ; L’âme cachée de Lacretelle 4 apparaît
comme un ouvrage d’introspection psychologique, où l’on assiste à la peinture
de certains caractères introvertis, secrets et mystérieux, tandis que Charles Plisnier
dans Faux passeports 5 désigne déjà par le titre du livre la condition d’exilés
des révolutionnaires qui peuplent son univers de fiction.
Parmi les procédés dont se sert le nouvelliste pour organiser son recueil, les
auteurs analysés privilégient trois types de structures, que nous désignons, à la