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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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236<br />

L’ENSEMBLE-DE-NOUVELLES CHEZ MARCEL ARLAND<br />

sa déclaration d’amour dans le lit à côté <strong>de</strong> Paule, ne supporte pas qu’elle lui dise,<br />

admirative :<br />

«␣ Comme tu parles bien mon chéri ! On croirait entendre M.␣ Le curé.␣ »<br />

C’est l’effondrement 13 .<br />

Dans «␣ Peut-être␣ », Pierre reçoit difficilement les confi<strong>de</strong>nces <strong>de</strong>s amours passés<br />

d’Annie qu’il a pourtant provoquées :<br />

C’était dit. Un effondrement. 14<br />

Et c’est la même réaction qui, dans «␣ <strong>La</strong> soirée <strong>de</strong>s Bergman␣ », envahit le pasteur<br />

lorsqu’il apprend que le comptable, <strong>de</strong>venu riche à la suite d’un héritage, avait<br />

en réalité escroqué son mon<strong>de</strong> :<br />

Bergman, Charles Bergman ! Quel effondrement ! 15<br />

Mais c’est surtout la réapparition <strong>de</strong> personnages qui tisse <strong>de</strong>s liens entre les<br />

<strong>nouvelle</strong>s. Il y a le clerc suicidé Toby Pansard, sa femme Céline, le curé Cotton,<br />

Rose Palour<strong>de</strong>, monsieur <strong>La</strong>urent, monsieur <strong>de</strong> Burge, présents dans plusieurs <strong>de</strong>s<br />

<strong>nouvelle</strong>s, et significativement tous dans la <strong>de</strong>rnière, «␣ Bénédiction␣ », comme<br />

<strong>de</strong>s acteurs qui viennent saluer à la fin d’une pièce. Cette fin, en forme <strong>de</strong> clôture,<br />

est doublée par un court texte dans lequel le narrateur livre une espèce <strong>de</strong><br />

commentaire général :<br />

C’est aussi le matin, quand je quitte ces êtres plus ou moins misérables, mais dont<br />

aucun ne m’était tout à fait inconnu. Un matin <strong>de</strong> juillet. […]. Je fais quelques pas<br />

dans la cour ; j’y ai trouvé <strong>de</strong>s fleurs que je ne connaissais plus <strong>de</strong>puis mon enfance :<br />

<strong>de</strong>s immortelles ; dans mon village, elles poussaient sur les tombes ; elles aussi, ce<br />

matin, m’ont paru jeunes. C’est précisément l’heure où, chaque jour, dans l’homme<br />

enténébré qui reprend conscience <strong>de</strong> soi, un peu <strong>de</strong> l’enfant qu’il fut jadis essaie <strong>de</strong> le<br />

rejoindre, mais n’est jamais reconnu. Il me semble que je peux un instant l’accueillir.<br />

Le mon<strong>de</strong> que je perçois n’est pas moins pur qu’à ses yeux ; il est plus beau, il est<br />

irremplaçable. […] Sans doute n’est-il qu’un mot qu’il faille dire <strong>de</strong>vant ce mon<strong>de</strong>,<br />

même si on ne le dit que pour d’autres, ou pour les morts : bénédiction 16 .<br />

Le <strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> ce court texte final redouble la clôture du recueil, en reprenant<br />

le titre <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière <strong>nouvelle</strong> ; quant <strong>aux</strong> «␣ êtres plus ou moins misérables␣<br />

» dont il est question, ce sont ceux qui gravitent autour <strong>de</strong> monsieur Muller,<br />

le personnage principal <strong>de</strong> «␣ Bénédiction␣ » ; mais ils sont aussi plus généralement<br />

les êtres <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s <strong>nouvelle</strong>s d’À perdre haleine, familiers au narrateurauteur<br />

qui se souvient et unit par la fiction ce qui fut, ceux qui furent, qui il fut et<br />

qui il est.<br />

À perdre haleine n’est pas le seul recueil à être gratifié d’un péritexte. Tous les<br />

ensembles-<strong>de</strong>-<strong>nouvelle</strong>s le sont, soit d’un texte encadrant initial – il s’agit alors<br />

d’un paratexte dans lequel l’auteur souligne la cohérence du recueil –, soit d’un

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