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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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NOUVELLE ET ROMAN<br />

DANS LE GENRE POLICIER :<br />

LE CAS SIMENON<br />

<strong>La</strong> plupart <strong>de</strong>s critiques et historiens <strong>de</strong> la littérature policière considèrent Edgar<br />

Allan Poe comme l’inventeur du genre. C’est lui qui a, pour la première fois,<br />

écrit une histoire tournant autour d’une énigme criminelle à résoudre. C’est lui<br />

aussi qui a attiré l’attention du lecteur non plus sur l’aventure du malfaiteur,<br />

mais sur la manière dont un second personnage, l’investigateur, éclaircit le mystère<br />

du crime. Dans les œuvres policières qui viendront après la sienne, les mêmes<br />

éléments <strong>de</strong> base sont toujours repris : le mystère <strong>de</strong> la chambre close, le<br />

nombre limité <strong>de</strong> personnages, les indices trompeurs à première vue, la reconstitution<br />

<strong>de</strong> l’histoire du crime…<br />

Pourtant, plusieurs auteurs corrigent l’assertion que Poe serait le père fondateur<br />

du genre, en soulignant comme Boileau et Narcejac que «␣ ce qu’il a inventé,<br />

c’est le récit court, la «␣ short story␣ », la <strong>nouvelle</strong> policière. Il est passé à côté du<br />

roman policier proprement dit parce qu’il n’a pas consenti à développer l’élément<br />

dramatique que tout mystère contient à l’état latent 1 ␣».<br />

Les textes <strong>de</strong> Poe sont <strong>de</strong> belles démonstrations analytiques mais ce ne sont<br />

pas encore <strong>de</strong>s romans policiers. C’est Émile Gaboriau – on le sait – qui, vingt ans<br />

plus tard, a adapté le genre policier à la forme romanesque.<br />

Il faut donc faire la distinction entre <strong>nouvelle</strong> policière et roman policier, car les<br />

<strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> récit s’opposent l’un à l’autre par plusieurs traits distinctifs.<br />

Certains écrivains préten<strong>de</strong>nt que la <strong>nouvelle</strong> est la forme la plus adéquate à la<br />

<strong>de</strong>scription d’une détection fictive. En ce qui concerne les récits policiers <strong>de</strong> Conan<br />

Doyle, par exemple, on s’accor<strong>de</strong> généralement pour dire que les <strong>nouvelle</strong>s<br />

dont Sherlock Holmes est le héros sont plus réussies que les quelques romans<br />

dans lesquels le fameux détective apparaît. Gilbert Keith Chesterton, le père spirituel<br />

<strong>de</strong> l’abbé Brown, a lui aussi préféré la short story au texte plus long. Même<br />

Ellery Queen, Agatha Christie et John Dickson Carr se sont occasionnellement<br />

essayés à la <strong>nouvelle</strong>, en écartant la forme romanesque qui leur était pourtant<br />

plus familière. Ernest Gid<strong>de</strong>y explique d’où vient cette prédilection :<br />

L’intrigue policière est conçue comme un épiso<strong>de</strong> dont la présentation ne doit pas<br />

excé<strong>de</strong>r vingt-cinq ou trente pages. Elle se concentre en effet sur <strong>de</strong>s éléments constitutifs<br />

indispensables à la solution <strong>de</strong> l’énigme : quand et où le délit a-t-il été perpétré<br />

? Qui en est l’auteur ? Quels sont les indices qui permettront <strong>de</strong> le démasquer ?<br />

Sont écartées comme hors <strong>de</strong> propos les considérations, souvent essentielles dans un<br />

vrai roman, qui ne sont que <strong>de</strong>s circonstances concomitantes sans rapport direct<br />

avec le jeu policier 2 .

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