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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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FLORENCE BOUCHET 21<br />

sonnages, on parlera (pour emprunter encore la terminologie <strong>de</strong> Genette) <strong>de</strong> récit extradiégétique<br />

ou bien métadiégétique (le cas ambigu du Chevalier, lorsqu’il rejoint le narrateur omniscient, serait<br />

à la limite du récit intradiégétique).<br />

11 Le programme iconographique du ms. BNF fr. 12559, particulièrement développé (94 miniatures),<br />

privilégie nettement le récit-cadre allégorique (le voyage du Chevalier et ce qu’il y rencontre) et ne<br />

consacre donc que peu d’illustrations <strong>aux</strong> <strong>nouvelle</strong>s (n°␣ 41 : Alerain ; n°␣ 50 : la «␣ prestresse␣ » ; n°␣60:<br />

Alexandre et la pierre magique ; n°␣ 75 : la dame et les trois perroquets), sans doute parce que l’illustrateur<br />

perçoit aussi les <strong>nouvelle</strong>s comme <strong>de</strong>s digressions et qu’il préfère gui<strong>de</strong>r le lecteur en<br />

soulignant la trame narrative du texte.<br />

12 Cf. le texte édité par William ROACH et traduit par Colette-Anne VAN COOLPUT-STORMS. Paris : Le<br />

<strong>Livre</strong> <strong>de</strong> poche (Lettres gothiques), 1993.<br />

13 Preuve <strong>de</strong> son vif succès, la <strong>nouvelle</strong> se retrouve également dans le <strong>Livre</strong> du Chevalier <strong>de</strong> la Tour<br />

<strong>La</strong>ndry, le <strong>Livre</strong> <strong>de</strong> Leesce <strong>de</strong> Jean Le Fèvre (entre␣ 1380 et␣ 1387), le Mesnagier <strong>de</strong> Paris. <strong>La</strong> fin du XIV e<br />

s.␣ connaît encore d’autres avatars <strong>de</strong> l’histoire : la Vita Griseldis metrificata <strong>de</strong> Pierre <strong>de</strong> Hailles et une<br />

adaptation théâtrale anonyme en vers en 1395.<br />

14 Cf. Paul MEYER, «␣ Le conte <strong>de</strong>s trois perroquets␣ », Romania ; n°␣ 16, 1887, p.␣ 565-569 ; Jan TE WINKEL,<br />

«␣ Le conte <strong>de</strong>s trois perroquets␣ », Romania ; n°␣ 19, 1890, p.␣ 109-112.<br />

15 William W.␣ RYDING, Structure in Medieval Narrative. <strong>La</strong>␣ Haye-Paris : Mouton, 1971, p.␣ 158.<br />

16 Éd. Jean FRAPPIER. Genève : Droz, 1964, §␣ 13, 25, 57, 71, 73.<br />

17 Ce qui en fait un cas-limite par défaut, comme l’histoire d’Alerain constitue un cas-limite par excès<br />

(cf. note 19).<br />

18 e e<br />

Cette réunification narrative s’observe dans d’autres œuvres tardives. Dès la fin du XIII ␣ s., la 82<br />

<strong>nouvelle</strong> du Novellino «␣ conta come la damigella di Scalot mori per amore di <strong>La</strong>ncialotto <strong>de</strong>l <strong>La</strong>c␣ ».<br />

On y retrouve une brièveté similaire à celle du <strong>Livre</strong> du Chevalier errant (une page, avec un peu plus<br />

<strong>de</strong> détails <strong>de</strong>scriptifs) mais le ton est différent : <strong>La</strong>ncelot n’est plus que le partenaire absent <strong>de</strong> cette<br />

tragique histoire d’amour, et tout l’honneur, certes pathétique, revient à la <strong>de</strong>moiselle. En 1485,<br />

l’anglais Thomas Malory effectuera une vaste compilation <strong>de</strong>s grands textes arthuriens pour composer<br />

son Morte d’Arthur ; on y retrouve l’histoire <strong>de</strong> «␣ the Fair Mai<strong>de</strong>n of Astolat␣ », contée plus en<br />

détail, dans une série <strong>de</strong> chapitres consécutifs (livre␣ XVIII, ch. 9-20). Thomas <strong>de</strong> Saluces et ces auteurs<br />

ont donc chacun à leur manière répondu au vœu <strong>de</strong> R.␣ Dubuis, qui considère que l’histoire <strong>de</strong> la<br />

<strong>de</strong>moiselle d’Escalot pourrait être extraite <strong>de</strong> la Mort Artu «␣ pour constituer une <strong>nouvelle</strong> indépendante<br />

et du plus haut intérêt␣ » («␣ <strong>La</strong> genèse…␣ », p.␣ 18).<br />

19 Ce pluriel tend à constituer l’histoire d’Alerain et <strong>de</strong> la fille <strong>de</strong> l’empereur <strong>de</strong> Rome comme un caslimite<br />

<strong>de</strong> <strong>nouvelle</strong> : l’accumulation <strong>de</strong>s péripéties et leur durée (c’est presque la vie entière <strong>de</strong>s<br />

personnages qui est évoquée) donnent plutôt l’impression d’un mini-roman, bien que le récit s’en<br />

tienne à quatre feuillets environ.<br />

20 «␣ Je vous vueil raconter d’une dame que je vy en la court le Dieu d’Amour […]. Si vous en rettrairay<br />

la verité, et entretant le jour passera et mieulz exploiterons nostre chemin␣ » (ch. 279, f° 152c). <strong>La</strong><br />

fonction <strong>de</strong> la <strong>nouvelle</strong> comme passe-temps <strong>de</strong> voyage est aussi sollicitée par Chaucer dans les<br />

Canterbury Tales. C’est par ailleurs l’une <strong>de</strong>s fonctions assignées <strong>aux</strong> insertions lyriques dans certains<br />

romans <strong>de</strong>s XIII e -XV e ␣ s., tel le Meliador <strong>de</strong> Froissart (vers 1385). On pourrait donc en ce sens parler<br />

d’insertions narratives.<br />

21 Cette <strong>nouvelle</strong> est elle-même incluse dans un exposé didactique <strong>de</strong> nature historique qui constitue<br />

déjà une digression par rapport à l’histoire du Chevalier ; aussi Orose, après en avoir terminé avec<br />

Grisilidis, revient-il en ces termes à son exposé inachevé : «␣ Mais pour retourner a nostre matiere<br />

premiere parlée␣ » (ch. 275, f° 144b).<br />

22 Récit inséré, rappelons-le, dans le discours qui retrace élogieusement la vie <strong>de</strong> <strong>La</strong>ncelot.<br />

23 Les «␣ procédés stimulateurs␣ » (selon l’expression <strong>de</strong> J.␣ Rasmussen) qui parsèment le récit servent à<br />

entretenir le plaisir du lecteur et son désir <strong>de</strong> connaître la suite <strong>de</strong> l’histoire : «␣ vous <strong>de</strong>vés savoir␣ »,<br />

«␣ et bien sachiez␣ », «␣ que vous diroye ?␣ », «␣ si comme <strong>de</strong>visé vous ay␣ », «␣ assés vous pourroye dire␣ »…<br />

(Cf. J. Rasmussen, <strong>La</strong> prose narrative <strong>française</strong> du XV e siècle. Copenhague␣ : E. Munksgaard, 1958, p.␣ 78-<br />

84).<br />

24 <strong>La</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s compagnons du Chevalier traduit les réactions possibles du lecteur-auditeur <strong>de</strong><br />

l’histoire <strong>de</strong> Grisilidis au XV e ␣ s., qui est en droit <strong>de</strong> trouver injustifiée l’attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Gautier à l’égard

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