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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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AUX CONFINS DU GENRE.<br />

TRAITEMENT DE LA NOUVELLE<br />

PAR MARGUERITE YOURCENAR<br />

POUR TROIS SUJETS REVISITÉS<br />

ENTRE LA MORT CONDUIT L’ATTELAGE (1933), L’ŒUVRE<br />

AU NOIR (1968)<br />

ET COMME L’EAU QUI COULE (1982)<br />

Le roman qu’on vient <strong>de</strong> lire a pour point <strong>de</strong> départ un récit d’une cinquantaine <strong>de</strong><br />

pages, D’après Dürer, publié avec <strong>de</strong>ux autres <strong>nouvelle</strong>s […] en 1934 1 . Ces trois récits<br />

[…] n’étaient d’ailleurs que trois fragments isolés d’un énorme roman conçu et en<br />

partie fiévreusement composé entre␣ 1921 et␣ 1925, entre ma dix-huitième et ma vingt<strong>de</strong>uxième<br />

année 2 .<br />

Marguerite Yourcenar entame ainsi la note qui suit L’œuvre au noir 3 , publié en<br />

1968.<br />

S’il faut l’en croire, c’est «␣ à peu près inchangés␣ » (OR, p.␣ 838) que paraissent<br />

chez Grasset les trois fragments du roman-fleuve ou, plutôt, comme elle dit, du<br />

«␣ roman-océan␣ » (OR, p.␣ 903). À première vue, c’est aussi à peu près tout ce qu’on<br />

trouvera dans le paratexte pour entamer une réflexion sur le genre <strong>de</strong> la <strong>nouvelle</strong><br />

chez Yourcenar. Mais, bien sûr, <strong>de</strong>s questions fusent. Comment et pourquoi estelle<br />

passée <strong>de</strong> la <strong>nouvelle</strong> au roman, <strong>de</strong> D’après Dürer à L’œuvre au noir ? Pourquoi<br />

a-t-elle tour à tour amputé et amplifié l’histoire <strong>de</strong> Nathanaël, D’après Rembrandt,<br />

en la faisant même éclater en <strong>de</strong>ux <strong>nouvelle</strong>s, Un homme obscur et le curieux<br />

appendice que constitue Une belle matinée ? Pourquoi, enfin, en est-elle restée à la<br />

<strong>nouvelle</strong> <strong>de</strong> D’après Greco à Anna, soror…, ne modifiant qu’à peine un texte <strong>de</strong><br />

près <strong>de</strong> soixante ans ?<br />

Bien sûr, on peut objecter que la brièveté, caractéristique la plus unanimement<br />

invoquée <strong>de</strong> la <strong>nouvelle</strong>, ne convient pas à l’énorme entreprise <strong>de</strong> la jeune Yourcenar,<br />

qui se propose rien moins qu’«␣ une ample fresque s’étalant sur plusieurs<br />

siècles et sur plusieurs groupes humains reliés entre eux soit par les liens du sang,<br />

soit par ceux <strong>de</strong> l’esprit␣ ». Imagine-t-on Zola ou Martin du Gard découpant leurs<br />

sagas en <strong>nouvelle</strong>s ? «␣ Ce premier projet <strong>de</strong> jeunesse eût été plutôt un immense<br />

Archives du Nord romanesque, et […] l’histoire <strong>de</strong> Zénon n’y aurait été qu’un épiso<strong>de</strong>␣<br />

», dit-elle dans Les yeux ouverts 4 . Mais il y a plus. Un mécanisme, sorte <strong>de</strong><br />

mouvement long <strong>de</strong> l’écriture, s’est mis en œuvre, attesté par <strong>de</strong>ux confi<strong>de</strong>nces<br />

mesurées et presque contradictoires exprimées dans la Note <strong>de</strong> l’auteur. <strong>La</strong> première<br />

nous rassure :

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