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La nouvelle de langue française, aux frontières des ... - L'esprit Livre

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RENÉ GODENNE 489<br />

3. n’utiliser aucune étiquette : la tendance, à l’inverse, <strong>de</strong> moins en moins<br />

courante (991 titres sur les 4156 répertoriés au XX e siècle).<br />

Les auteurs privilégient quatre étiquettes simples (parmi les étiquettes composées,<br />

seule se détache «␣ contes et <strong>nouvelle</strong>s␣ ») : «␣ <strong>nouvelle</strong>␣ », le terme originel, le<br />

plus employé parce qu’il est tenu pour le terme générique, «␣ conte␣ », qui <strong>de</strong>vient<br />

son principal synonyme dès le XIX e siècle, «␣ histoire␣ », le moins courant, ces <strong>de</strong>ux<br />

<strong>de</strong>rniers cédant la place à «␣ récit␣ » dans la secon<strong>de</strong> moitié du XX e siècle.<br />

Ce n’est qu’à la fin du XVIII e siècle que le mot proprement dit <strong>de</strong> «␣ recueil␣ »<br />

apparaît dans les titres : Les après-soupers <strong>de</strong> la campagne, ou Recueil d’histoires courtes<br />

(1759), Le passe-temps ou Recueil <strong>de</strong> contes intéressants (1761) <strong>de</strong> Brunet <strong>de</strong> Baines,<br />

Recueil <strong>de</strong> contes et <strong>de</strong> <strong>nouvelle</strong>s (1785) <strong>de</strong> Mirabeau, Les soirées amusantes, ou Recueil<br />

choisi <strong>de</strong> nouve<strong>aux</strong> contes mor<strong>aux</strong> (1785). S’il désigne désormais le volume<br />

dans les préfaces, avant-propos ou autres notices en quatrième <strong>de</strong> couverture<br />

(«␣ Et me voici publiant un recueil <strong>de</strong> <strong>nouvelle</strong>s␣ », C.␣ Debans, Histoires <strong>de</strong> tous les<br />

diables, 1882, p.␣ XII ; «␣ […] ce recueil <strong>de</strong> <strong>nouvelle</strong>s paysannes␣ », F.␣ André, À l’ombre<br />

du clocher, 1941…), le terme, comme étiquette ou mot-titre, est rare (24 exemples<br />

<strong>de</strong> 1940 à 1980, 21 après) 9 .<br />

Toutes ces constantes terminologiques, si diverses à première vue, ne sont rien<br />

d’autre que le signe chez les nouvellistes <strong>de</strong> s’inscrire dans une même et unique<br />

tradition, d’y faire référence sans cesse, d’affirmer en fin <strong>de</strong> compte la pérennité<br />

d’un genre qui, <strong>de</strong>puis le XV e siècle, n’a jamais cessé d’exister. Comme on va le<br />

voir, la constante <strong>de</strong> peaufiner autant l’intitulé <strong>de</strong>s titres grâce à une série <strong>de</strong><br />

formules qui traversent les siècles n’est rien d’autre également que le signe, presque<br />

désespéré, d’amener le lecteur à un genre qui souffre trop <strong>de</strong> la concurrence<br />

du roman, qui, lui, n’a nul besoin <strong>de</strong> cette «␣ mise en scène␣ » terminologique :<br />

vive donc le titre-programme, expression d’un Sésame ouvre-toi à la curiosité !<br />

C’est la tradition, notifiée dès le premier recueil du XV e siècle, d’indiquer le<br />

nombre <strong>de</strong> textes 10 ; c’est, à l’instar encore du même recueil, le redoublement<br />

rendu possible par les <strong>de</strong>ux sens <strong>de</strong> «␣ <strong>nouvelle</strong>␣ », qui adjectif (exprimant l’idée <strong>de</strong><br />

nouveauté), qui substantif (exprimant l’idée <strong>de</strong> genre) 11 . C’est dès le XVII e siècle<br />

l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> préciser le milieu géographique où se déroule l’action 12 ; cette autre<br />

<strong>de</strong> mettre d’emblée l’accent sur le type <strong>de</strong> sujet 13 . C’est, dès le XIX e siècle, la recherche<br />

<strong>de</strong> titres frappants : Nouvelles blanches et noires (1823) <strong>de</strong> S.␣ Doin, Contes<br />

abracadabrants (1851) 14 <strong>de</strong> L.␣ Lemercier <strong>de</strong> Neuville, Contes à l’eau <strong>de</strong> rose (1871)<br />

<strong>de</strong> C.␣ Buet, Contes hilarants (1891) et Contes désopilants (1893) d’A. Silvestre, Contes<br />

pour les assassins (1892) <strong>de</strong> M.␣ Beaubourg, L’homme à la jaguar, <strong>nouvelle</strong>s insolites<br />

(avec ce titre en <strong>de</strong>uxième page : L’homme à la jaguar et autres contes du volant,<br />

treize <strong>nouvelle</strong>s plus ou moins insolites, se référant à <strong>de</strong>s titres divers <strong>de</strong> l’Automobile,<br />

1970) <strong>de</strong> R.␣ Sim, Vian<strong>de</strong> froi<strong>de</strong>, <strong>nouvelle</strong>s saignantes (1985) <strong>de</strong> P.␣ Siniac, Dernières<br />

<strong>nouvelle</strong>s <strong>de</strong> King-Kong (1994)… Tout au long du XX e siècle, les nouvellistes forgent<br />

<strong>de</strong>s formules à partir d’expressions du langage courant. Du genre : Vous aurez <strong>de</strong><br />

mes <strong>nouvelle</strong>s (1957) <strong>de</strong> J.-J.␣ Gautier, Pas <strong>de</strong> <strong>nouvelle</strong>s, bonnes <strong>nouvelle</strong>s (1974) <strong>de</strong>

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