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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

eux aussi dans leur travail sur un corpus de théories architecturales qui ne sont pas à<br />

proprement parler « scientifiques » mais sont autant d’éléments de codification du travail,<br />

d’un système de références partagées (Champy, 1998). On pourrait à l’inverse insister sur les<br />

éléments de subjectivité qui envahissent en permanence le travail <strong>des</strong> psychologues<br />

expérimentalistes, et plus généralement celui de toutes les professions qui aspirent à la rigueur<br />

de la pensée physico-mathématique. La médecine moderne, qui est pour les fonctionnalistes<br />

ou les néo-wébériens l’archétype du modèle professionnel est traversée de part en part par un<br />

« esprit clinique » qui pousse les médecins à raisonner en terme de particularisme, de<br />

subjectivité, d’expérience et à laisser de côté les manuels et les théories scientifiques 110 . Dans<br />

le même esprit, il s’est toujours trouvé <strong>des</strong> psychologues du travail, même parmi les plus<br />

positivistes d’entre eux (J.-M. Lahy ou Edouard Toulouse par exemple), pour soutenir que les<br />

tests n’avaient en soi aucune valeur, tant que le psychologue n’avait pas opéré la synthèse <strong>des</strong><br />

données éparses obtenues par l’expérimentation, donnant ainsi à voir la « totalité psychique »<br />

de l’individu 111 . Certains psychologues formés à l’école expérimentale ont été jusqu’à<br />

soutenir que les tests n’avaient d’intérêt que s’ils étaient le prétexte à une observation clinique<br />

du comportement du candidat en situation d’examen (Carrard, 1953, p. 14). Les frontières<br />

entre psychologie expérimentale et psychologie clinique ne seraient donc pas si étanches, et<br />

ce que nous avons présenté comme une dichotomie s’apparenterait davantage dans la pratique<br />

à un continuum. Cette thèse d’une continuité entre psychologie clinique et psychologie<br />

expérimentale a donné à Lagache (1949) un argument en faveur de l’« unité de la<br />

psychologie » à un moment où celle-ci s’organisait comme profession et devait faire front<br />

commun dans ses revendications. Pourtant, cette vision œcuménique est loin de faire<br />

l’unanimité au sein de la profession. La plupart <strong>des</strong> psychologues reconnaissent aujourd’hui<br />

que les praticiens sont profondément divisés. Dans un ouvrage collectif consacré à l’avenir de<br />

la psychologie, l’un d’entre eux s’exprimait en ces termes :<br />

« Deux faisceaux se <strong>des</strong>sinent, qui tendent de façon évidente à dissocier notre<br />

communauté. (….) Certaines lignes de force orientent les psychologues qui<br />

définissent formellement leur activité par son caractère explicite et vérifiable,<br />

psychologues que l’on qualifie souvent de "scientifiques". D’autres lignes de force<br />

orientent les psychologues qui attachent plus d’importance à d’autres critères, tel le<br />

110 FREIDSON (1984, p. 179) note à propos du médecin praticien que « La confiance qu’il accorde à son<br />

expérience clinique personnelle pèse d’un si grand poids qu’[il] finit par privilégier l’autorité de ses facultés<br />

sensorielles, s’affranchissant ainsi de l’hégémonie générale de la tradition ou de la science »<br />

111 L’initiateur de l’école française de psychotechnique, Edouard Toulouse écrit en 1929 : « la psychotechnique,<br />

si elle veut progresser, ne doit pas se cantonner dans <strong>des</strong> métho<strong>des</strong> strictement objectives et quantitatives dont se<br />

servent encore exclusivement beaucoup de psychotechniciens (…) la psychotechnique doit devenir, par une de<br />

ses activités une science clinique, une science d’observation » (TOULOUSE, 1929)<br />

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