Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

sciences humaines, elle dépasse le regard objectivant du médecin − notamment les notions de
maladies, de symptômes ou de pathologie. Le psychologue centre plutôt son action sur la
dimension intersubjective et sur la relation qui se noue au cours de l’entretien.
On voit donc jouer ici deux forces opposées : d’un côté, la SFP et plus largement les
universitaires insistent sur la nécessaire unité de la psychologie et la cohérence de ses
applications dans différents registres pratiques ; de l’autre, le SNP et les praticiens cherchent
simultanément à étendre le mandat de la profession (compromettant ainsi le principe d’unité)
et à promouvoir une unité de façade autour du "titre unique" de psychologue. Une telle
position est toutefois difficile à tenir, car elle suppose le maintien d’un équilibre subtil entre
les intérêts des différents segments réunis sous cette bannière, ce qui s’avère particulièrement
délicat face à la multiplicité des statuts et des types de pratiques 93 .
tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006
c) Logique de statut ou logique de profession ?
Le dernier facteur de segmentation interne tient en effet principalement à la diversité
des statuts d’exercice des psychologues, qui entre partiellement en conflit avec l’idée d’un
titre unique. Le projet de loi envisagé par l’ANOP fixait l’accès au titre à six années d’études
supérieures pour tous les psychologues, quelle que soit leur spécialité et leur statut. Or,
l’accès à la plupart des emplois de psychologues existant dans la Fonction publique se faisait
à un niveau d’études inférieur, avec une grande hétérogénéité et une mobilité quasi inexistante
d’une administration à l’autre : D.U. pour les psychologues scolaires, licence de psychologie
pour ceux du ministère du Travail (AFPA) et du ministère de la Justice (éducation
surveillée) ; maîtrise pour les Conseillers d’orientation de l’Education nationale ; DESS pour
les psychologues du ministère de la Santé etc. Un certain nombre de syndicats – notamment
celui des Conseillers d’orientation (SNES) et ceux des Psychologues scolaires (SPEN et
AFPS) – s’opposèrent donc initialement au projet de l’ANOP, qui risquait de remettre en
cause la légitimité de leurs membres à porter le titre. Lors des discussions ayant précédé le
vote de la loi à l’Assemblée, certains députés ne manquèrent pas de rappeler la situation
particulière des Psychologues scolaires et des Conseillers d’orientation « qui se demandent
effectués par un médecin.
93 Une telle situation n’est bien évidemment pas propre à la psychologie. La plupart des professions déploient
une énergie considérable à maintenir une unité de façade aux yeux du public. C’est le cas des ingénieurs dont les
caractéristiques sociales tendent à en faire un groupe éclaté (BENGUIGUI et MONJARDET, 1968), mais aussi celui
des avocats, dont le code de déontologie va jusqu’à interdire toute référence publique à la spécialité (KARPIK,
1985).
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