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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

qu’un faux-semblant, une « rhétorique » qui tourne en boucle ouverte, puisqu’elle n’est<br />

jamais confrontée à un quelconque principe de réalité. Potentiellement, tout groupe peut ainsi<br />

monopoliser un champ du savoir et se constituer un monopole, indépendamment de<br />

l’efficacité de ces savoirs. Dans un tel cadre théorique, les histoires de professionnalisation<br />

sont condamnées à être le perpétuel recommencement <strong>des</strong> mêmes étapes (codification <strong>des</strong><br />

produits ou <strong>des</strong> services proposés par les professionnels, restriction de l’offre, coalition <strong>des</strong><br />

offreurs…).<br />

Une critique encore plus radicale du pouvoir professionnel se trouve dans la<br />

sociologie néo-marxiste. Ces auteurs relient le pouvoir professionnel aux mécanismes plus<br />

larges de distribution du pouvoir dans la société. Les professions, à travers l’hégémonie<br />

idéologique qu’elles exercent sur la société, sont un rouage dans la reproduction <strong>des</strong> formes<br />

de domination. Ce point de vue, particulièrement développé par la sociologie <strong>des</strong> professions<br />

britannique au cours <strong>des</strong> années 1980 est défendu notamment par Johnson qui affirme que<br />

« Le professionnalisme (…) ne peut apparaître que là où les processus idéologiques et<br />

politiques soutenant [cette idéologie] coïncident avec les besoins du capital » (Johnson, 1977,<br />

p. 106). Le propos de l'auteur est illustré par quelques exemples tirés de l’histoire britannique.<br />

Dans un article de 1982, il s’intéresse aux relations entre l’État et certaines professions<br />

(comptables, médecins, architectes) au cours de la période de colonisation. Il montre que<br />

l'emprise de l'État sur de nouveaux secteurs de la vie sociale n'a été rendue possible que parce<br />

qu'une partie de ses missions de contrôle a été déléguée aux professionnels. En retour, ces<br />

derniers ont pu asseoir progressivement leur légitimité et leur statut au sein de la société.<br />

Navarro, dans son ouvrage Medicine under capitalism (1976), illustre lui aussi un point de<br />

vue « néo-marxiste » sur les professions, à partir de l’exemple de la médecine britannique.<br />

Selon lui les principaux déterminants de l’organisation et du fonctionnement <strong>des</strong> systèmes de<br />

santé sont à rechercher non dans le pouvoir professionnel <strong>des</strong> médecins eux-mêmes, mais<br />

dans l’attitude <strong>des</strong> classes dominantes de la société capitaliste à l’égard de la médecine. La<br />

pratique de la médecine a ainsi pu émerger comme profession dans la mesure où elle servait<br />

les intérêts de la classe capitaliste, en véhiculant un discours scientifique neutralisateur jetant<br />

un voile sur les véritables déterminants – sociaux – de la maladie.<br />

La nature <strong>des</strong> savoirs que les professions mettent en œuvre ne sont pas neutres et<br />

doivent être analysés à l’aune de la contribution qu’ils apportent à <strong>des</strong> fonctions plus<br />

générales de reproduction sociale : ils reflètent l’hégémonie idéologique de la classe<br />

minces et malhonnêtes »<br />

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