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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

biais, d’accroître la production. Les intérêts <strong>des</strong> travailleurs et du patronat sont supposés se<br />

rejoindre dans une spirale vertueuse de productivité.<br />

Dans ces deux conceptions toutefois, le travail reste encore principalement une<br />

source d’aliénation. Le corporatisme d’un côté, le courant <strong>des</strong> relations humaines de l’autre<br />

cherchent, selon <strong>des</strong> formules différentes, à conjurer le malheur qui pèse sur le travail. Ceci<br />

est tout particulièrement vrai de l’approche <strong>des</strong> relations humaines, qui voit dans le travailleur<br />

une matière flexible, objet plus ou moins conscient <strong>des</strong> manipulations <strong>des</strong> directions<br />

d’entreprise. La psychologie sociale industrielle ne peut dès lors que se limiter à<br />

"surimprimer" sur <strong>des</strong> rapports de production essentiellement aliénants <strong>des</strong> relations sociales<br />

artificiellement recréées. C’est tout au moins de cette manière qu’elle a été reçue en France et<br />

plus généralement en Europe dans l’immédiat après-guerre : comme un "sparadrap" qui ne<br />

parviendrait pas à panser les plaies bien plus profon<strong>des</strong> du capitalisme et <strong>des</strong> formes<br />

d’aliénation qu’il produit.<br />

Cette vision pessimiste du travail se trouve radicalement transformée à partir <strong>des</strong><br />

années 1970, à travers la mise en place d’expériences d’enrichissement du travail, d’abord<br />

dans les pays d’Europe du Nord (Norvège et Suède principalement), puis une décennie plus<br />

tard aux Etats-Unis sous le nom de « Quality of working life » 7 . Le discours qui se développe<br />

à partir de cette période relève le travail de son indignité : il devient la source d’un<br />

accomplissement, d’une réalisation de soi, d’un épanouissement personnel, à travers la<br />

participation et une implication plus grande dans l’entreprise. On passe d’une conception du<br />

travail entaché de "douleur" à celle du travail comme œuvre, source de réalisation de soi<br />

(Arendt, 1961). Ces nouvelles théories, issues notamment <strong>des</strong> travaux du Tavistock Institute,<br />

développent une critique de la psychologie sociale industrielle qui, en attachant trop<br />

d’importance aux facteurs d’"ambiance" du travail, n’est pas parvenue à transformer<br />

radicalement l’expérience négative <strong>des</strong> travailleurs. La solution consiste alors pour eux à<br />

changer le système socio-technique lui-même en accordant plus de responsabilité aux<br />

travailleurs (développement d’équipes semi-autonomes par exemple, à l’image du modèle<br />

prôné par Dubreuil). Ces évolutions préfigurent à bien <strong>des</strong> égards l’actuel discours sur les<br />

"compétences", supposées elles aussi permettre aux travailleurs d’investir leur travail d’un<br />

sens subjectif, dont la logique de « qualification » les avait jusqu’alors privés, les<br />

intellectuel et politique de Dubreuil, voir LE VAN-LEMESLE (2004).<br />

7 Expression plus ou moins équivalente à l’expression française d’"amélioration <strong>des</strong> conditions de travail", mais<br />

qui a été traduite sous le nom de « qualité de vie de travail » ou de « qualité de vie au travail » (voir par exemple<br />

Céreq, 1981).<br />

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