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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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entrepreneurs de la psychologie dans la mesure où ses produits de recherche ont été<br />

de plus en plus dirigés vers le marché et non vers le monde académique »<br />

tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

Cette thèse mérite toutefois d’être discutée 16 . D’une part, Münsterberg se montre soucieux de<br />

faire double allégeance auprès du monde académique et du monde industriel. Ainsi, si son<br />

ouvrage Psychology and Industrial Efficiency (1913), nourri de nombreux cas pratiques, est<br />

clairement <strong>des</strong>tiné au grand public l’ouvrage de l’année suivante Grundzüge <strong>des</strong><br />

Psychotechnik (1914) est tourné vers les milieu <strong>académiques</strong>. La correspondance de<br />

Münsterberg fait également apparaître une personnalité plus complexe, qui se rapproche<br />

davantage de l’image de l’universitaire classique telle qu’elle pouvait exister en Allemagne à<br />

la fin du XIX e siècle, que de celle d’un « marchand d’idées ». Il y a d’abord chez lui un<br />

profond scientisme et une croyance dans les progrès de la psychologie scientifique, qui doit se<br />

substituer à toutes les autres formes de psychologies métaphysiques et spiritualistes.<br />

Déplorant dans une lettre à Cattell la mise en place d’un programme de recherches sur<br />

l’immortalité à Harvard en 1913, il écrit :<br />

« Mon université, au sein de laquelle je me bats depuis 20 ans contre le mysticisme<br />

bon marché du public de la Nouvelle-Angleterre, a donné sa sanction officielle à de<br />

telles pseudo-recherches, répudiant par là tout l’esprit de mes efforts scientifiques.<br />

James lui même avait toujours su tracer une ligne claire entre ses lubies mystiques et<br />

le travail universitaire, où il ne laissait pas pénétrer ces fantaisies antiscientifiques<br />

» 17<br />

La psychologie scientifique n’est donc pas pour Münsterberg une simple<br />

« rhétorique », qui lui permettrait d’asseoir la valeur de ses produits sur un marché. Il est<br />

profondément convaincu qu’elle apporte une solution plus efficace que les autres aux<br />

problèmes posés par la naissance de la grande industrie aux Etats-Unis et par la diffusion du<br />

modèle organisationnel taylorien. Par ailleurs, il manifeste un certain mépris pour le monde<br />

<strong>des</strong> affaires, ne craignant pas à l’occasion de se mettre à dos les industriels qui ne croient pas<br />

en la valeur intrinsèque de ses métho<strong>des</strong>. Dns une réponse adressée à l’entreprise Ford, déçue<br />

de la teneur d’un enseignement de psychologie industrielle délivré par un de ses élèves<br />

(Harold Burtt), il répond que la demande de l’entreprise avait été construite sur de fausses<br />

espérances : le public s’attendait à une « causerie sur l’efficacité industrielle, dans l’esprit de<br />

ce que font les magazines populaires » et il ne trouva qu’un aride cours de psychologie<br />

scientifique, « un remède, qui aurait dû soigner tous ces industriels ». Les attentes de<br />

l’entreprise auraient certainement pu être comblées par un homme d’affaire, mais « aucun<br />

16 Pour un point de vue plus nuancé que celui de VAN DE WATER, voir la biographie très complète de<br />

Münsterberg par HALE (1980).<br />

17 Arch. Münsterberg, Boston Public Library, Mss. Acc. 2303, correspondance entre Münsterberg et Cattell, 29<br />

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