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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

dominante. Ce ne sont pas les savoirs en tant que tels qui sont sources de pouvoir mais plutôt<br />

leur signification sociale et la manière dont ils s’insèrent dans <strong>des</strong> jeux de pouvoir qui les<br />

dépassent.<br />

L’ouvrage de Larson (op. cit.) constitue une tentative intéressante de synthèse <strong>des</strong><br />

approches néo-marxistes et néo-wébériennes sur les professions, puisque sont pris en compte<br />

simultanément le rapport <strong>des</strong> professions au marché (dans une perspective néo-wébérienne) et<br />

leur rapport à la structure sociale dans son ensemble (perspective marxiste). Dans leur rapport<br />

au marché, les professions apparaissent comme <strong>des</strong> entreprises collectives, <strong>des</strong> groupes<br />

d’intérêt qui cherchent à s’approprier les chances de profit associées à un domaine d’activité.<br />

Pour cela la profession doit au préalable « trouver un accord sur une base cognitive et imposer<br />

une définition prédominante de la marchandise [commodity] professionnelle » (op. cit., p.<br />

211). On voit que, comme chez Berlant, le préalable de toute stratégie de conquête d’un<br />

monopole est de définir simultanément le bien qui va être échangé et le marché sur lequel il<br />

va être échangé. Le concept central proposé par Larson dans cette optique est celui de « projet<br />

professionnel » (Professional project), qui désigne le travail collectif du groupe en vue de<br />

monopoliser un segment du marché du travail. Le projet professionnel englobe trois<br />

dimensions : la recherche d’un monopole sur un champ d’activité (avec la garantie <strong>des</strong><br />

pouvoirs publics) ; la définition <strong>des</strong> savoirs légitimes associés à ce monopole et la conquête<br />

d’un statut social. La clôture du monopole économique est directement liée à la clôture du<br />

monopole dans l’ordre cognitif 30 puisque le travail du projet professionnel est précisément<br />

d’établir un pont entre ces deux dimensions, transformant ainsi un ordre de ressources<br />

symboliques en ressources économiques. Larson partage avec les fonctionnalistes l’idée que<br />

tous les types de connaissances ne sont pas susceptibles de donner naissance à une<br />

« profession ». Pour que le projet professionnel ait quelque chance de succès, il faut que la<br />

connaissance portée par le groupe « soit suffisamment spécifique pour rendre distinctive la<br />

marchandise professionnelle, elle doit être suffisamment codifiée ou formalisée pour<br />

permettre une standardisation du produit, et en dernier ressort <strong>des</strong> producteurs, et enfin elle ne<br />

doit pas être trop clairement codifiée afin de permettre à un principe d’exclusion de jouer »<br />

(op. cit., p. 30-31). L’ouvrage ne s’intéresse d’ailleurs qu’aux seules professions établies et le<br />

30 La clôture dans l’ordre cognitif joue un rôle de premier ordre chez Larson : « (…) la standardisation cognitive<br />

semble être une variable cruciale, si ce n’est la plus cruciale, dans la séquence qui, partant de la mise en place de<br />

centres de formation monopolistiques, conduit à une professionnalisation certifiée [credentialed] et au contrôle<br />

du marché » (1977, p. 46). On voit bien l’opposition entre un tel point de vue et l’existence, au sein d’une même<br />

profession de « segments » construits sur la base de paradigmes différents. La standardisation cognitive est par<br />

nature exclusive : elle suppose la cohésion du groupe et interdit par conséquent la coexistence de paradigmes<br />

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