Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006
psychologique », introduite par Rossolimo en 1909, qui donne une liste de différents types
d’aptitudes susceptibles d’être mobilisées dans les activités professionnelles, mesurées au
moyen de tests appropriés : volonté, perception, mémoire visuelle, auditive et numérique,
attention, compréhension, combinaison, adresse, imagination, observation… Les différentes
aptitudes sont ensuite représentées sur un graphique unique qui permet de comparer
rapidement les différents individus (le score à chaque épreuve étant représenté par un point).
C’est de la même manière que procède le psychologue Julien Fontègne 3 , lorsqu’il met en
rapport les aptitudes individuelles et celles requises par les différentes activités
professionnelles et qu’il souligne la nécessité d’étudier ces deux dimensions séparément.
Chez l’individu, elles sont explorées au moyen de tests ; au point de vue de la profession, il
suffit de « déterminer le plus exactement possible les fonctions psychiques en jeu dans le
processus de travail de la profession (attention, imagination, jugement etc.) » et de « faire
ressortir quelles qualités morales sont indispensables pour l’exercer convenablement »
(Fontègne, 1921, p. 89). Pour reprendre l’exemple de l’aptitude « attention », Fontègne
distingue deux formes d’attention. L’attention concentrée, qui manifeste une capacité à se
concentrer sur un seul objet, et qui est particulièrement recommandée dans les activités
exigeant une grande concentration (chimiste ou ouvrier fondeur par exemple) ; et l’attention
distribuée, qui révèle une aptitude à se diriger sur plusieurs objets à la fois et prédispose
l’individu à un emploi de conducteur de tramway, qui, « pour éviter un danger, aura à
manœuvrer des deux mains frein et manette » ou de téléphoniste, « dont l’attention devra se
porter sur différents signaux lumineux » à la fois 4 .
Une telle conception des aptitudes révèle rapidement ses limites. D’une part, il y a
une grande imprécision dans les termes utilisés, qui tient à la confusion entre le langage
courant et le langage scientifique : que sont au juste ces aptitudes (intelligence, mémoire…) :
que désignent-elles, sont-elles inscrites en tant que telles dans les individus ou révèlent-elles
des processus d’interaction complexe entre différentes aptitudes élémentaires ? Existe-t-il
entre elles une hiérarchie ? Sont-elles totalement indépendantes l’une de l’autre ou la réussite
à l’une détermine-t-elle la réussite à toutes les autres ? Comme le souligne Bonnardel (1943,
p. 133) :
« Que penser de la tendance dogmatique qui voudrait résoudre le problème de
l’adaptation de l’homme à son travail en déterminant d’abord les aptitudes
3 Instituteur de formation, Julien Fontègne (1878-1944) fut l’un des principaux organisateurs de l’orientation
professionnelle en France dans les années 1920-1930, mais il s’intéressa assez peu aux questions de sélection
professionnelle. Il fonda, avec Laugier et Piéron, l’INOP en 1928.
4 FONTEGNE, 1921, p. 32
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