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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

produisent » (Durkheim, 1912, p. 245). En toute logique, Durkheim ne devrait pas accorder<br />

de statut particulier aux professions « savantes », puisque les catégories de connaissance à<br />

l’œuvre dans un milieu professionnel devraient toutes être vues comme le produit de la vie<br />

collective du groupe, de ses traditions, de ses pratiques et non comme la simple transposition<br />

d’un savoir théorique 11 . Différentes hypothèses peuvent être avancées pour comprendre la<br />

position prise ici par Durkheim. D’une part, son propos n’est en réalité pas aussi tranché. Il<br />

reconnaît que les professions savantes elles-mêmes sont « de l’ordre de l’action, de la<br />

pratique », bien que dans leur cas la théorie constitue un élément essentiel de cette pratique. Il<br />

n’y a donc pas opposition entre l’idée que les connaissances pratiques sont produites par la<br />

vie collective du groupe et l’idée que leur socialisation doit les mettre au contact d’un<br />

enseignement théorique. De même, les professions pratiques comportent elles aussi une part<br />

de théorie. Aussi, les jeunes gens qui se <strong>des</strong>tinent aux carrières industrielles et commerciales<br />

« ont-ils besoin du Collège aussi bien que le futur magistrat. Tout au moins, il ne peut y a voir<br />

entre eux sous ce rapport que <strong>des</strong> différences de degré » (op. cit., p. 363). Par ailleurs, ces<br />

écrits sont antérieurs aux recherches sur les formes élémentaires de la vie religieuse, où la<br />

sociologie durkheimienne de la connaissance sera poussée à son terme. La thématique <strong>des</strong><br />

groupes professionnels ne sera d’ailleurs pas reprise par Durkheim par la suite, ce qui<br />

explique que la question du rôle <strong>des</strong> savoirs dans les groupes professionnels soit restée en<br />

suspens. C’est au sein d’une autre tradition théorique et dans un autre contexte social, celui de<br />

la sociologie fonctionnaliste anglo-saxonne, que la question sera de nouveau abordée.<br />

b) Parsons : les professions et l'avènement de la rationalité<br />

Bien qu’elle joue aujourd’hui largement le rôle d’un modèle « repoussoir » dans<br />

l’analyse sociologique <strong>des</strong> professions, la théorie fonctionnaliste n’en constitue pas moins un<br />

point de passage obligé dans l’analyse <strong>des</strong> rapports entre savoirs et professions. Les auteurs<br />

s’inscrivant dans ce courant nous décrivent l’avènement d’une société où la légitimité <strong>des</strong><br />

processus de décision sera fondée sur la rationalité scientifique et sur les détenteurs de cette<br />

rationalité : les professionnels.<br />

Cette thèse se trouve d’abord exprimée par Carr-Saunders et Wilson, dans leur essai<br />

The professions (1964, [1933]). Comme Durkheim, les auteurs insistent sur les vertus<br />

11 Cette ligne de recherches sera poursuivie ultérieurement par HALBWACHS (1994 [1925], pp 222-265) qui<br />

établit une hiérarchie <strong>des</strong> professions selon le type de compétence qu’elles mettent en œuvre. Compétences<br />

essentiellement « sociales », qui prennent leur source en dehors de la matérialité du monde du travail, dans les<br />

catégories supérieures (juges, médecins, enseignants…) ; compétences « techniques » pour les employés et<br />

ouvriers.<br />

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