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PSYCHOLOGIE ET REGULATION DES CONDUITES INDIVIDUELLES SUR LE MARCHE DU
TRAVAIL
tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006
La psychologie est une profession très segmentée, faite d’un grand nombre de
spécialités et d’applications, dans des domaines aussi variés que la santé, le travail,
l’éducation, la gérontologie… Il nous fallait donc un point d’entrée pour guider l’analyse.
Dans cette entreprise ambitieuse, nous avons privilégié l’étude d’un champ d’application
particulier de la discipline : celui du travail. Trois raisons au moins peuvent justifier ce choix.
La première résulte certainement d’un « effet de perspective ». Les questions du sociologue,
comme celles de l’historien, sont imprégnées par l’esprit de son temps et le retour sur le passé
traduit souvent le souci de répondre à des interrogations urgentes. Le point de départ de nos
interrogations a partie liée avec les transformations actuelles des formes de travail,
caractérisées par une emprise croissante, si ce n’est des psychologues, tout au moins des outils
issus de la psychologie sur les questions de travail et d’emploi. Cela se manifeste notamment
dans l’usage croissant des méthodes psychologiques dans le recrutement des cadres, dans les
bilans de compétence, dans la prise en charge des chômeurs, mais aussi dans les diverses
formes de gestion de la fatigue et du stress au travail. Les sociologues analysent cette
évolution comme le produit d’un changement des formes de régulation du travail salarié, qui
se traduit par le passage d’une logique collective de la qualification à une logique individuelle
de la compétence. On s’interroge peu en revanche sur la genèse de ce nouveau discours et de
ce nouveau regard sur le travail. Est-il dû à une emprise croissante des psychologues sur les
questions de travail et d’emploi dans un contexte où la question des débouchés se pose de
façon particulièrement aigüe pour les psychologues sortant de l’université, l’offre créant en
quelque sorte sa propre demande ? Faut-il y voir le signe d’un « projet professionnel » réussi,
comme tendent à le suggérer certaines analyses sociologiques ? 16 Il nous a semblé nécessaire,
pour répondre à ces différentes questions, de comprendre comment s’était structurée la
profession de psychologue du travail, quel avait été son mandat, comment il s’était recomposé
au fil du temps, au gré des conjonctures du marché du travail et de la demande sociale.
Cette interrogation est venue croiser un autre programme de recherche, issu de
l’économie des conventions, portant sur les acteurs et les institutions du marché du travail.
Cette approche suggère que, contrairement à la vision promue par le modèle classique du
16 Voir sur ce point par exemple l’ouvrage de Marc LORIOL (2000), qui analyse la manière dont les psychologues
se font complices –parfois à leur insu – d’une psychologisation des questions de fatigue au travail, en reportant
sur les salariés la responsabilité de leur mauvaise fatigue afin de mieux préserver les formes d’organisation
existantes.
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