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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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1. Le « front scientifique » : La genèse du paradigme expérimentaliste en<br />

psychologie<br />

a) L’héritage <strong>des</strong> Lumières : la psychologie entre médecine et<br />

philosophie<br />

tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

La psychologie a longtemps été considérée en France comme une branche de la<br />

philosophie et à ce titre, son enseignement s’est d’abord institutionnalisé au début du XIX e<br />

siècle au sein <strong>des</strong> chaires de philosophie <strong>des</strong> facultés de lettres. On fait généralement remonter<br />

cette tradition de psychologie philosophique au dix-huitième siècle et au matérialisme de<br />

certains Encyclopédistes – Condillac (1714-1780), d’Holbach (1723-1789) Destutt de Tracy<br />

(1754-1836) – pour qui toute forme d’entendement et de connaissance peut être dérivée du<br />

monde matériel et corporel. Ce courant philosophique, qualifié de « sensualisme », remet en<br />

cause la dichotomie héritée de Descartes entre l’âme et le corps : la sensation est le fait<br />

premier de l’âme humaine. Par conséquent, l’ensemble <strong>des</strong> facultés humaines (l’attention, la<br />

mémoire, l’imagination, la comparaison, la réflexion, l’entendement…) prennent leur source<br />

dans la sensation et le rapport au monde matériel. Certains philosophes <strong>des</strong> Lumières<br />

(Christian Wolff, Condillac…) empruntent le terme de « psychologie » pour désigner ce<br />

nouveau domaine d’investigation de l’âme humaine. D’autres (Destutt de Tracy,<br />

Laromiguière, Maine de Biran) le refusent, et lui préfèrent le terme d’ « Idéologie », estimant<br />

le projet d’une psychologie (littéralement : « science de l’âme ») trop ambitieux.<br />

Il serait arbitraire de tracer <strong>des</strong> frontières trop rigi<strong>des</strong> entre la pensée médicale et la<br />

pensée philosophique du dix-huitième siècle : comme le souligne Jacques Léonard (1992) les<br />

deux domaines se fécondent mutuellement. Des personnalités comme Cabanis, Pinel ou<br />

Corvisart établissent un pont entre la philosophie sensualiste <strong>des</strong> Lumières et une pensée<br />

médicale qui se renouvelle au lendemain de la Révolution. La naissance de la méthode<br />

anatomo-clinique au début du XIX e siècle ne saurait d’ailleurs être comprise sans l’arrière<br />

fonds <strong>des</strong> Lumières et ce souci d’aller puiser dans l’expérience et l’observation l’origine <strong>des</strong><br />

différentes affections corporelles :<br />

98<br />

« Antiscolastique, l’analyse en médecine (…) refuse les classifications a priori et les<br />

systèmes ex cathedra, réclame la liberté de critique et de recherche et épouse la<br />

méthode inductive (Condillac, Lavoisier, Laplace, Cabanis : même combat). Elle<br />

doit d’abord décomposer les apparences, disséquer les organes et les tissus, recenser<br />

les symptômes, passer en revue les circonstances, en remontant éventuellement dans<br />

le passé (…) » (Léonard, op. cit., p. 221).<br />

La première moitié du XIX e siècle, voit s’épanouir une floraison de doctrines<br />

psychologiques qui prolongent les débats <strong>des</strong> Lumières. Les unes sont plus ou moins inscrites

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