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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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4. La tradition française : les professions sous le prisme du salariat<br />

tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

Le sociologue Joan Heilbron constatait en 1986 qu’il existait « très peu de textes de<br />

sociologues français où la question <strong>des</strong> professions et de la professionnalisation est abordée<br />

dans le sens anglo-saxon <strong>des</strong> termes » (1986, p. 61). Les mêmes incompréhensions semblent<br />

exister aujourd’hui entre sociologues français et anglo-saxons, en dépit du considérable<br />

développement de la sociologie <strong>des</strong> professions en France depuis une quinzaine d’années 34 .<br />

Les sociologues anglo-saxons, toutes tendances théoriques confondues, continuent de placer<br />

les savoirs théoriques au cœur de leur définition <strong>des</strong> professions 35 , là où les sociologues<br />

français adoptent la conception la plus large possible du concept de profession 36 . Cette<br />

divergence théorique fondamentale tient principalement à deux facteurs : 1) <strong>des</strong> différences de<br />

contexte historique et national dans les mo<strong>des</strong> d’émergence <strong>des</strong> groupements professionnels<br />

2) <strong>des</strong> traditions de recherche différentes dans le domaine de la sociologie du travail et <strong>des</strong><br />

professions.<br />

a) Le poids <strong>des</strong> contextes nationaux dans la définition du<br />

« professionnalisme »<br />

Comme dans beaucoup d’autres pays, le terme de « profession » ne désigne pas<br />

aujourd’hui en France une classe particulière d’occupations. Il s’applique aussi bien aux<br />

occupations les plus prestigieuses (médecins, avocats, <strong>ingénieurs</strong>…) qu’aux plus humbles.<br />

Cette acception du terme est en réalité le fruit d’un travail de construction historique.<br />

Heilbron (art. cit., p. 61) nous rappelle en effet que jusqu’au dix-septième siècle le terme de<br />

« profession » s’applique aux groupes possédant une technique, un « art », plus<br />

particulièrement dans le domaines <strong>des</strong> « arts libéraux » (médecins, juristes, notaires,<br />

professeurs…). Le terme de « métier » était quant à lui davantage réservé aux « arts<br />

mécaniques ». Le terme trouvait son origine dans la « profession à accomplir par le nouvel<br />

entrant lors d’une cérémonie rituelle qu’on trouvait à l’entrée de toutes les corporations, qui<br />

suivaient ainsi le modèle religieux de la profession de foi » (art. cit., p. 63). Il était donc<br />

directement lié au régime corporatif en vigueur sous l’ancien régime et c’est précisément la<br />

34 Développement qui a toutefois été davantage marqué par l’influence de Hughes et de l’interactionnisme,<br />

popularisé par J.-M. Chapoulie, que par les autres courants de la sociologie <strong>des</strong> professions anglo-saxonnes (voir<br />

sur ce point GADEA, 2003, p. 214-215).<br />

35 Il suffit pour cela d’observer le sous titre de quelques ouvrages récents, qui font tous deux référence à un type<br />

bien particulier de savoir : le dernier ouvrage de FREIDSON (2001) a pour sous titre « On the Practice of<br />

knowledge » ; celui d’ABBOTT (1988) : « An Essay on the division of expert labor ».<br />

36 Il suffit pour s’en convaincre d’observer le large éventail d’activité recensées dans l’ouvrage de DUBAR et<br />

TRIPIER (1998), qui va <strong>des</strong> médecins aux chauffeurs routiers en passant par les moniteurs de ski.<br />

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