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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

disciplines dans leur contexte social, et les répercussions éventuelles de ces changements sur<br />

les professions. Il ne montre pas non plus le rôle que peuvent jouer certains segments de la<br />

profession savante dans la professionnalisation d'une activité, situation qui a été bien décrite<br />

par Paicheler (1992) à propos de la psychologie américaine. Inversement, contrairement à ce<br />

qu’a montré Ben David (1960) à partir de l’exemple de la médecine allemande au XIX e , le<br />

rôle <strong>des</strong> praticiens dans l’évolution <strong>des</strong> savoirs n’est pas envisagée. Les professions sont avant<br />

tout définies comme de la science appliquée : la production du savoir est première et les<br />

applications ne peuvent venir que dans une seconde étape.<br />

Enfin, les fonctionnalistes promeuvent une vision monolithique et pacifiée de la<br />

science. Celle-ci n'est jamais le lieu éventuel d’un conflit entre différents segments ou<br />

différentes tendances, prétendant chacune incarner une représentation légitime de l’activité<br />

scientifique en question. Or, dans le cas de la psychologie comme ailleurs 20 plusieurs<br />

définitions de la science coexistent à un moment donné. Comment ces différentes définitions<br />

sont-elles prises en compte dans la structure professionnelle ? Coexistent-elles, sous <strong>des</strong><br />

formes pacifiées, au sein de la profession, ou donnent-elles naissance à <strong>des</strong> segments<br />

distincts ? Un début de réponse à ces questions viendra de la tradition interactionniste, à<br />

travers les notions de « conventions » (Becker, 1988 [1982]) et de « segments<br />

professionnels ». (Bucher et Strauss, 1992 [1961]).<br />

2. Les savoirs négociés : la tradition interactionniste<br />

En réaction contre les taxinomies fonctionnalistes, qui placent la connaissance<br />

théorique au cœur de la définition <strong>des</strong> professions, la sociologie interactionniste montre le<br />

caractère construit et constamment négocié <strong>des</strong> savoirs mobilisés par les groupes<br />

professionnels. Chez les fonctionnalistes, le savoir expert détenu par le professionnel justifiait<br />

l’asymétrie de position entre ce dernier (détenteur ultime d’un savoir positif et « affectivement<br />

neutre » vis-à-vis <strong>des</strong> problèmes de son client) et son client (techniquement incompétent et<br />

sujet à l’émotion). Les attributs extérieurs <strong>des</strong> professions avaient pour fonction de protéger le<br />

client contre toute tentative d’abus de pouvoir de la part du professionnel. Mais en mettant les<br />

savoirs théoriques et « l’idéal de service » (Goode, 1969) au cœur de la définition <strong>des</strong><br />

professions, les fonctionnalistes adoptaient implicitement le point de vue <strong>des</strong> professionnels<br />

sur eux-mêmes, toujours enclins à placer l’expertise au cœur de leur propre définition 21 . La<br />

20 Pour les définitions concurrentes de la pratique médicale en France au XX e siècle, voir JAMOUS et PELOILLE<br />

(1971) et PARADEISE (1985, p. 23)<br />

21 Les nombreuses affinités existant entre la sociologie interactionniste et le discours indigène <strong>des</strong> professions<br />

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