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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

d’évaluation. Comme le remarque Lyon-Caen, « le psychologue exerce son activité d’une<br />

part, sur la personne de quelqu’un, qui ne lui a pas demandé de s’intéresser à lui qui lui est<br />

adressé par un tiers (un service, une entreprise) ; d’autre part pour le compte d’une personne<br />

(un cabinet et, directement ou indirectement, une entreprise, donc, un employeur), à laquelle il<br />

sera fait rapport sur les dispositions mentales de l’intéressé » 47 . Cette situation pose un<br />

problème juridique complexe : « une personne (A) peut-elle payer une autre personne (B)<br />

pour qu’elle démonte dans tous ses rouages le psychisme d’un tiers (C) ? ». Il n’y a<br />

certainement pas de réponse univoque à cette question sur un strict plan juridique, faute d’une<br />

définition précise du psychisme, mais aussi parce que cette question demeure en suspens pour<br />

bien d’autres professions : psychiatres, détectives privé, journalistes, médecins du travail,<br />

médecins <strong>des</strong> compagnies d’assurance etc. Dans tous ces cas de figure, un tiers vient<br />

également s’interposer entre le professionnel et celui ou celle qui est l’objet de l’acte<br />

professionnel. On le voit notamment dans le traitement social de l’inaptitude au travail, où les<br />

médecins du travail ont parfois du mal à faire valoir leur indépendance face aux pressions<br />

multiples qu’exercent sur eux les employeurs 48 . Il est alors parfois difficile de savoir si le<br />

médecin est avant tout au service de son « client » (logique d’aide) ou s’il est au service de<br />

son employeur (logique d’étiquetage), l’intérêt de l’un et de l’autre pouvant fréquemment<br />

diverger.<br />

La réponse au problème provient peut-être alors davantage de la sociologie que du<br />

droit. On s’aperçoit en effet que dans le cas <strong>des</strong> services aux personnes (juridiques, médicaux,<br />

éducatifs, sociaux…), la garantie d’indépendance <strong>des</strong> professionnels vient <strong>des</strong> contrepoids<br />

collectifs que la profession peut mettre en place pour protéger le client de tout risque<br />

d’intrusion excessive dans sa sphère privée. La déontologie médicale (sanctionnée par la loi)<br />

interdit ainsi au médecin du travail de divulguer à l’employeur toute information sur le salarié<br />

qui ne serait pas en rapport direct avec la nature de l’emploi occupé. De même, la plupart <strong>des</strong><br />

professions évoquées ci-<strong>des</strong>sus ont <strong>des</strong> co<strong>des</strong> de déontologie, qui fixent <strong>des</strong> limites au<br />

comportement du professionnel et lui imposent une certaine « modération » dans son<br />

comportement (Karpik, 1995). Conformément à un schéma fonctionnaliste, la profession est<br />

la gardienne de valeurs qui ne se laissent pas dissoudre dans le jeu du marché ou de la<br />

bureaucratie ; elle résiste à ces deux logiques, en raison d’une force sociale garantie par le<br />

de chacun.<br />

47 LYON-CAEN (2000, p. 98)<br />

48 Voir sur ce point LE BIANIC (2003).<br />

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