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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

d’administration du CNAM, il plaide en faveur de la création d’un laboratoire de physiologie<br />

du travail au sein de cet établissement. Après avoir rappelé à ses collègues la profonde<br />

différence entre la psycho-physiologie du travail et le système Taylor il conclut à la nécessité<br />

de créer un laboratoire d’étude du travail, dans la mesure où « la machine humaine n’a pas<br />

encore été étudiée ».<br />

La figure d’Edouard Toulouse fait le lien entre ces différents milieux. Né à Marseille<br />

en 1865, Toulouse se <strong>des</strong>tine d’abord à une carrière de journaliste avant de se tourner vers la<br />

médecine, mais il mènera parallèlement à sa carrière de médecin une activité de publiciste,<br />

écrivant plus de quatre mille articles au long de sa vie. En 1897, il est nommé médecin-chef à<br />

l’Asile de Villejuif où il crée trois ans plus tard un « laboratoire de psychologie<br />

expérimentale » qui deviendra le creuset de la psychologie appliquée française. Son influence<br />

fut considérable sur la génération de psychologues et physiologistes du travail qui prirent part<br />

aux travaux du laboratoire et lancèrent la psychologie sur les voies de la professionnalisation<br />

dans l’entre-deux guerres : Henri Piéron, Henri Laugier et Jean-Maurice Lahy. C’est<br />

certainement la pensée de Toulouse qui a conduit la psychologie appliquée à emprunter une<br />

voie si différente de celle suivie aux Etats-Unis. Par ses convictions politiques et sociales,<br />

Toulouse est une figure typique de l’univers intellectuel de la Troisième république, à michemin<br />

entre un scientisme rationalisateur et un humanisme généreux. Il est convaincu<br />

notamment que les progrès de la psychologie et de la physiologie permettront une répartition<br />

plus juste et plus efficace <strong>des</strong> individus. Comme Imbert, il pense que « l’étude <strong>des</strong> malaises<br />

dont souffre le monde du travail n’est pas encore entrée dans une période scientifique et<br />

même rationnelle » (1907, p. 191). Il suggère donc la création d’un laboratoire central du<br />

travail 40 qui aurait pour mission de déterminer « la résistance et les aptitu<strong>des</strong> nécessaires dans<br />

chaque industrie, et proposerait une épreuve tendant à sélectionner les travailleurs » (ibid, p.<br />

195). Ce laboratoire serait également appelé à jouer un rôle crucial en cas de conflit social :<br />

« Une grève est une maladie sociale. Quand une épidémie de fièvre typhoïde frappe<br />

une région, il semble maintenant naturel d’y envoyer une commission d’hygiénistes,<br />

qui examinent l’eau, les puits, les égouts. Semblablement, en cas d’une crise<br />

économique violente, le Laboratoire du Travail aurait à expédier sur place une<br />

commission de recherches qui saurait procéder à <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> méthodiques, établir les<br />

tares et les vices de fonctionnement, signaler les remè<strong>des</strong> efficaces. » (ibid, p. 198)<br />

40 Imbert défendait lui aussi la création de laboratoires du travail dans toutes les gran<strong>des</strong> villes de France. Dans<br />

un rapport remis à la Chambre de Commerce de Marseille en 1919, il propose la création à Marseille d’un<br />

« Centre d’étu<strong>des</strong> scientifiques et expérimentales <strong>des</strong> questions se rapportant au travail ouvrier », afin de<br />

prévenir les grèves de dockers (Arch. CCI Marseille, A 34,12)<br />

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