Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006
années 1950, elle apparaît aujourd’hui isolée et peu représentative de l’activité des autres
psychologues. En témoigne notamment la faiblesse des liens que les psychologues du travail
entretiennent avec les associations professionnelles, mise en évidence à partir du
questionnaire. En témoigne aussi la faiblesse des carrières transversales, qui conduisent un
psychologue du travail à se tourner vers un emploi de clinicien ou même de psychologue
scolaire. Enfin, les psychologues du travail revendiquent peu leur titre et lorsqu’ils le font,
c’est souvent parce qu’il apparaît de manière officielle dans les grilles statutaires de leur
employeur. Tout concourt donc à isoler les psychologues du travail du reste de la profession.
L’évènement majeur a été de ce point de vue la professionnalisation progressive de la
psychologie clinique à partir des années 1960, qui est devenue, compte tenu de son poids
numérique et de la réception favorable de son discours au sein de la société, le « porteparole
» officiel de l’ensemble des psychologues, alors même que son discours était peu
ajusté à la réalité de l’activité des psychologues du travail. L’exploitation des archives du
principal syndicat de psychologues cliniciens, le SNP (Syndicat national des psychologues),
nous a permis de mettre au jour l’originalité de la professionnalisation de la psychologie, qui
offre l’exemple d’une profession qui s’est d’abord institutionnalisée à partir des années 1950
dans différents segments de la fonction publique, avant de transposer ses revendications sur
un plan plus large dans les années 1970 et 1980, conduisant à la loi de 1985. Contrairement à
ce qu’il en est aux Etats-Unis, la profession n’apparaît pas, en France, comme l’émanation
directe d’une discipline universitaire mais plutôt comme le produit de l’action publique dans
différents domaines (orientation, formation professionnelle, justice, santé mentale…). La
balkanisation actuelle de la profession, dont témoigne la diversité des intitulés de DESS et des
associations professionnelles, ne peut être comprise en dehors de cette histoire particulière.
L’autre dynamique est celle d’une segmentation croissante de la catégorie de
psychologue du travail, qui peine à définir son identité entre les professionnels de l’insertion
ou du travail social, ceux des ressources humaines sur les marchés internes et les spécialistes
du recrutement sur les marchés externes. Les mutations du champ de l’orientation
professionnelle au cours des trois dernières décennies (Dugué et al., 1999) ont déstabilisé le
profil des intervenants traditionnels de ce secteur, qui s’appuyaient jusqu’alors sur des savoirs
issus de la psychologie appliquée et bénéficiaient de statuts au sein de la Fonction publique.
La montée du chômage d’un côté, et de la « logique compétence » de l’autre, ont mis en avant
de nouvelles formes d’articulation entre les propriétés des individus et les besoins du marché
du travail, qui relèguent au second plan l’expertise des psychologues en matière de tests.
Aujourd’hui, ce savoir pratique sur l’orientation est de plus en plus concurrencé par d’autres,
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