Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006
Le ministère de l’Education nationale entérine ce point de vue en refusant en 1980
l’habilitation de sept DESS de psychologie clinique sur les quinze existants. Le
développement considérable des formations de psychologie clinique dans les années 1970
avait en effet entraîné une déconnexion croissante entre les diplômes délivrés et les débouchés
en milieu hospitalier et un taux de chômage particulièrement important parmi les diplômés de
psychologie.
L’autre grande association de psychologues, le SNP, défend un point de vue
différent. Ce syndicat, qui entend représenter « l’ensemble des praticiens », estime que la
psychologie est d’abord une pratique et que les psychologues cliniciens formés à l’université
doivent trouver des débouchés ailleurs que dans le seul champ de la santé 90 . Les universitaires
sont accusés de se désintéresser du sort de leurs étudiants et de ne pas donner une orientation
suffisamment professionnelle à leurs enseignements. En défendant les praticiens, le SNP
refuse de donner une définition limitative de la psychologie. Celle-ci est une clinique au sens
large, susceptible de s’appliquer dans de multiples domaines. Le président du SNP
s’exprimait en ces termes en 1985 : « Quels que soient leurs lieux d’exercices, les
psychologues sont porteurs d’un discours centré sur l’écoute, l’analyse ou l’aide au
développement des individus, des groupes et des organisations. La communauté de leurs
interventions s’établit autour de la non ingérence, dont ils font leur acte de foi. Comme
psychologues, ils s’interdisent de juger. Ils sont là pour éclairer les hommes et leurs
organisations afin que les premiers et les secondes trouvent en eux-mêmes leurs propres
réponses » 91 . On voit que dans le cadre d’une telle définition, peu d’activités sont exclues du
champ de la psychologie clinique. La décision de supprimer certains DESS est jugée
inacceptable, car elle empêcherait les étudiants de maîtrise de poursuivre leurs études jusqu’à
leur terme "normal". Elle risque aussi de créer une catégorie de psychologues sous-qualifiés,
simplement titulaires d’une licence ou d’une maîtrise, qui feraient concurrence aux titulaires
de DESS. D’autre part, dans une lettre adressée à la Ministre des Universités (Mme Saunier-
Seïté), le SNP fait valoir que « les besoins de psychologues en France sont loin d’être pourvus
dans nombre de secteurs. Les psychologues cliniciens ne sont pas seulement des spécialistes
employés dans les seules CHR, CHU, CHS (encore que bien peu pourvus) ; ils ont leur place
et leur efficacité dans des secteurs tels que les secteurs sociaux, médico-sociaux, éducatifs, la
90 Voir, pour un point de vue de praticien particulièrement représentatif de la position du SNP, DESPLOS (1986,
p. 235) : « (…) quant à nous, les praticiens, nous pensons qu’il est plus important de professionnaliser les filières
que de se laisser déborder par la question du nombre et ce, en rapport à une caractéristique épistémologique de
la clinique : l’antériorité et la supériorité de la praxis sur la théorie »
91 COHEN (1986, p. III)
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