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Les' ingénieurs des âmes'. Savoirs académiques ...

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tel-00096116, version 1 - 19 Sep 2006<br />

l’ergonomie (qui la concurrençait par une surenchère de « scientificité ») et la psychologie<br />

clinique (qui la tirait vers un paradigme différent de celui autour duquel elle s’était construite<br />

la psychologie du travail).<br />

Bien qu’utile pour comprendre les principes de division internes d’une profession,<br />

une approche en termes de « champs » ne permet pas d’éviter les écueils qui ont été évoqués<br />

dans la section précédente, puisque là encore, seule la dimension « rhétorique » <strong>des</strong> savoirs<br />

est prise en compte. Leur évolution n’est interprétée que dans la perspective de fermeture d’un<br />

marché du travail. A la limite, n’importe quel savoir pourrait être « vendu », pourvu que le<br />

groupe parvienne à convaincre <strong>des</strong> clients qu’ils en ont effectivement besoin. Or l’examen de<br />

la psychologie du travail montre que les évolutions internes de la discipline n’ont pas été<br />

systématiquement guidées par ce principe de fermeture. Comme nous le verrons, les<br />

transformations récentes de ce segment professionnel (depuis les années 1970) tiennent<br />

davantage à <strong>des</strong> clivages disciplinaires et à l’évolution du rapport de forces entre psychologie<br />

clinique et psychologie expérimentale qu’à tout autre facteur. Plutôt qu’un modèle purement<br />

causal, qui voit dans les changements <strong>des</strong> savoirs un simple prétexte, il faut privilégier un<br />

modèle séquentiel d’allers et retours entre une « profession » et une « discipline », qui ont<br />

chacune une relative autonomie et une durée structurale qui leur est propre.<br />

2. Les savoirs comme sources de segmentation <strong>des</strong> professions<br />

Un modèle séquentiel doit être en mesure d’expliquer les interactions entre les<br />

changements survenant dans la sphère de production <strong>des</strong> savoirs et ceux touchant les<br />

configurations professionnelles. Comment une transformation d’ordre scientifique affecte-telle<br />

une profession et ses mo<strong>des</strong> d’organisation ? Cette question est bien au cœur de notre<br />

recherche puisque la psychologie du travail s’est construite, <strong>des</strong> années 1920 aux années 1970<br />

autour d’un paradigme positiviste et expérimentaliste 61 qui a donné naissance à la profession<br />

de « psychotechnicien » et qu’elle doit aujourd’hui redéfinir sa place face au déclin de ce<br />

paradigme au sein d’une psychologie française dominée par la clinique. Le traitement de cette<br />

question n’échappe pas aux grilles d’analyse présentées précédemment puisqu’elle a été<br />

abordée successivement dans un cadre fonctionnaliste (Toren, 1975), néo-marxiste (Jamous et<br />

Peloille, 1973) puis constructionniste (Abbott, 1988).<br />

61 Les origines de cette conception expérimentaliste de la psychologie, adossée au modèle <strong>des</strong> sciences de la<br />

nature, sont en réalité bien antérieures aux années 1920 et remontent aux recherches de Wundt (1832-1920) en<br />

Allemagne dans les années 1860. Voir infra.<br />

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