les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
Le vrai talent brûle de trouver un ami pour l’apprécier.
Il ne songe nullement à acquérir une brillante réputation.
Youên-în, ayant pris jour avec P’ing-jou-heng, vint voir de nouveau
Yên-pé-hân.
— P’ing-tseu-tchi 304 , dit-il, ayant été provoqué par quelques
mots de ma part, serait très heureux de faire votre connaissance.
Quel jour mon frère aîné 305 est-il libre ? Votre jeune frère
viendra avec lui vous rendre visite.
— Votre jeune frère, dit Yên-pé-hân, aime les hommes de talent
comme sa propre vie ; si M. P’ing a, en effet, un véritable talent,
je regrette de ne pouvoir, tout de suite, lui serrer la main.
Comment pourrais-je différer cette entrevue ? Monsieur Chi-
kiao 306 , je souhaite vivement que vous l’ameniez, sans faute,
demain matin. Quoique mon petit jardin soit inculte et solitaire,
nous pourrons cependant, à l’exemple de P’ing-youên 307 , y boire
pendant dix jours.
— Puisque le maître est si bien disposé, reprit p.287 Youên-în,
nous viendrons demain matin.
En disant ces mots il sortit. Comme il allait partir, Yên-pé-hân le retint.
— J’ai encore un mot à vous dire, ajouta-t-il, si M. P’ing a
réellement du talent, je ne refuserais pas d’être son cocher ou
son palefrenier ; mais s’il est dépourvu de talent, ce qu’il a de
mieux à faire est de ne pas venir. De cette manière, il pourra
encore cacher son incapacité. Mais s’il vient en s’attribuant une
vaine réputation, mon pinceau sera sans pitié pour lui et, dans la
lice, je le mortifierai d’importance. Ne vous fâchez pas si je traite
un de vos amis avec peu d’égards.
— Parmi les hommes, dit Youên-în, M. P’ing est un vrai phénix ;
parmi les lettrés, c’est un dragon et un tigre 308 ; serait-il
convenable que quelqu’un le traita avec peu d’égards ?
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