les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
— Quels vers ai-je composés, dit Song-sîn, pour te les avoir
remis ?
Le petit domestique, interrogé des deux côtés, resta muet de crainte
et ne put dire un seul mot.
Tchang-în, le voyant garder le silence et changer de couleur, lui
appliqua deux soufflets.
vérité.
— Sot animal, lui dit-il, est-ce que tu n’aurais pas encore remis la
pièce de vers 575 à M. Song ?
Le petit domestique, intimidé par les coups, se vit obligé d’avouer la
— Je vous assure, dit-il, que ces vers 576 n’ont pas été composés
par M. Song.
Tchang-în éprouva une vive émotion.
— Si ce n’est point M. Song, lui dit-il, qui est-ce donc qui les a
faits ?
— Vous m’aviez envoyé dehors, répondit le petit domestique,
mais comme je suis d’un naturel vif, dans ma précipitation, je me
trompai de chemin et j’entrai par mégarde dans la chambre à
coucher d’une demoiselle de sa maison 577 . Elle m’arrêta et voulut
me faire battre comme si j’eusse été un voleur. De plus, en me
fouillant, on découvrit la copie des vers que vous m’aviez confiée.
Ne pouvant lui cacher ma commission, je me vis obligé de dire la
vérité. « En ce cas, me dit-elle, vous n’avez pas besoin de
chercher personne ; je vais vous faire à sa place les vers
demandés. » Elle prit alors un pinceau et p.565 acheva les vers en
un instant. Craignant de faire attendre Votre Seigneurie, je
m’empressai de vous les apporter.
A ce récit, Tchang-în trépigna de colère.
— Ainsi donc, s’écria-t-il, c’est toi, petit coquin, qui as fait
manquer mon projet ! Tu savais pourtant que ces vers devaient
être faits à l’insu de mademoiselle Chân. Comment as-tu osé
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