les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
— C’est ce que nous saurons après l’avoir vue, répondit P’ing-
jou-heng ; mais, en ce moment, il est impossible de porter un
jugement décisif.
Quand les deux amis rentrèrent à l’hôtellerie, il faisait déjà nuit. Les
domestiques leur ayant servi le souper, ils burent tête à tête et
discutèrent tour à tour. Tantôt c’était P’ing-jou-heng qui louait avec
emphase Ling-kiang-sioué ; tantôt c’était Yên-pé-hân qui parlait avec
admiration de la jeune beauté qu’il avait vue au haut du pavillon.
Quand ils eurent épuisé leur entretien, ils ne songèrent plus qu’à
imaginer quelque stratagème pour aller s’informer de mademoiselle
Chân.
Le poisson désire naturellement d’être en possession de l’eau ;
Le papillon n’aspire qu’à trouver des fleurs. p.463
A plus forte raison, lorsque le talent a rencontré la beauté,
Il pense à elle avec la même ardeur.
Depuis que mademoiselle Chân avait vu, au bas du pavillon, un bel
étudiant et les vers qu’il avait écrits sur le mur du jardin, elle ne faisait
que penser secrètement à lui. Sa mère l’ayant remmenée à la maison,
elle alla aussitôt voir Ling-kiang-sioué.
— Aujourd’hui, lui dit-elle, il m’est arrivé un grand bonheur, c’est
exactement comme lorsque vous étiez dans le temple de Mîn-
tseu 452 ; j’ai rencontré aussi un jeune homme de talent.
— Comment l’avez-vous rencontré ? demanda Ling-kiang-sioué.
— Étant allée voir mon père, je montai par hasard au haut du
pavillon du premier printemps pour regarder les pruniers en fleur.
Tout à coup, en ouvrant la fenêtre, j’aperçus au bas un jeune
homme qui était debout à côté des pruniers en fleur. Ses traits
étaient purs, distingués, pleins de charme. Dès qu’il m’eut vue au
haut du pavillon, il dirigea vers moi des regards passionnés ;
mais soudain il fut aperçu par plusieurs servantes qui le
poursuivirent avec acharnement et le chassèrent du jardin.
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