les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
CHAPITRE XVII
UNE JOLIE PERSONNE COMPOSE DES VERS A LA
PLACE D’UN SOT 541
p.524
P’ing-jou-heng n’ayant pu vaincre la jeune servante en
composant avec elle, sortit à pas précipités. Arrivé derrière le cabinet, à
l’endroit où le chemin se partage, il rencontra tout à coup Yên-pé-hân,
qui se retirait aussi en courant. En se retrouvant face à face, les deux
amis éprouvèrent une vive émotion. Ce fut Yên-pé-hân qui ouvrit le
premier la bouche :
— Comment vous êtes-vous tiré de votre concours ? demanda-t-
il à P’ing-jou-heng.
— Aujourd’hui, dit P’ing-jou-heng en hochant la tête à plusieurs
reprises, j’ai été couvert de confusion.
— Avez-vous vu mademoiselle Chân ? demanda Yên-pé-hân.
— Si je l’avais vue et que je n’eusse pu la vaincre en composant
avec elle, je ne me croirais pas déshonoré pour cela. Qui aurait
prévu que mademoiselle Chân, au lieu de se présenter elle-
même, enverrait une servante p.525 qui lui sert de secrétaire pour
composer des vers avec moi ? Quoique cette jeune fille ne soit
qu’une servante, elle a des manières graves et une figure
charmante ; elle me paraît infiniment supérieure à une
demoiselle de noble extraction. Mais je ne veux pas insister là-
dessus. Je dirai seulement qu’elle a tant d’esprit et de facilité
qu’il lui suffit d’abaisser son pinceau pour improviser des vers 542 .
A peine eus-je fini un quatrain que, sans prendre la peine de
réfléchir, elle en écrivit tout de suite un autre sur les mêmes
rimes. J’en composai un second, et, à son tour, elle en fit
aussitôt un autre sur les mêmes rimes. Je composai
successivement trois pièces de vers, et, trois fois de suite, elle en
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