les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
— Pour moi, dit Chân-hiên-jîn en riant, je trouve que ces jeunes
gens ont un esprit fin et un talent profond. Vous ne devriez pas,
toutes deux, les traiter avec dédain. Si vous composez avec eux,
qu’il vous suffise de ne rien perdre de votre réputation ;
comment pouvez-vous avoir la prétention de les humilier ?
— Ce sont de ridicules fanfarons, dit Ling-kiang-sioué ; si on ne
les mortifie pas d’importance, de manière qu’ils avouent
secrètement leur défaite, ils ne manqueront pas de parler devant
le monde avec arrogance. Le seul moyen est de composer
publiquement avec eux.
— Pour moi, dit Chân-taï en riant, je viens de trouver un
excellent stratagème ; il est tel que si nous sommes vaincues par
eux, nous ne perdrons rien de notre p.491 réputation, et que si
nous remportons la victoire, nous les couvrirons de honte.
— Ma fille, demanda Chân-hiên-jîn, quel est ce stratagème ?
— Mon père, dit Chân-taï, si, après leur arrivée, vous vous
contentez de les faire composer dans le même endroit, il est à
craindre que l’un ne supplée à l’inhabilité de l’autre, et qu’il n’y
ait des communications clandestines. Il faut les séparer, et
installer l’un dans le jardin oriental et l’autre dans le jardin
occidental. Votre fille et mademoiselle Ling se déguiseront sous
le costume bleu des servantes. « Dernièrement, leur dirons-nous,
mademoiselle Chân a été importunée par des hommes sans
talent, de sorte qu’après avoir dépensé son esprit en pure perte,
elle est tombée malade. Ne pouvant endurer aucune espèce de
trouble et de fatigue, elle a envoyé ses deux servantes que vous
voyez pour vous mettre d’avance à l’épreuve. Si vous avez
réellement quelque talent et que vous nous terrassiez, nous vous
prierons de monter au pavillon du pied de jade, où elle vous
recevra avec toute sorte d’égards ; mais si vous êtes dénués de
talent, et que vous soyez restés au-dessous de nous qui ne
sommes que des servantes, nous vous prierons de vous en
retourner, pour éviter d’être humiliés devant elle. » Si nous
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