les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
— Si nous arrivons de bonne heure à la capitale, repartit P’ing-
jou-heng, nous éprouverons une foule d’inconvénients.
— p.585 Quels inconvénients voyez-vous, demanda Yên-pé-hân, à
arriver de bonne heure à la capitale ?
— Il est fort honorable, répondit P’ing-jou-heng, d’acquérir, par
son talent, du mérite et de la réputation ; mais si l’on s’est fait
des protecteurs et que l’on réussisse, on perd une partie de sa
renommée. Par malheur, vous et moi, nous avons été
recommandés par le président du concours, et déjà notre nom de
famille et notre nom d’enfance sont parvenus jusqu’à l’empereur ;
de plus, nous venons d’obtenir tous deux un rang distingué 598 . Si
nous allons de bonne heure à la capitale, notre arrivée fera du
bruit dans le public et frappera l’attention de l’empereur lui-
même. S’il daigne nous mander en sa présence et nous accorder
des éloges, et qu’alors nous nous présentions au concours,
quand nous obtiendrions un rang élevé, on ne manquerait pas de
dire que les examinateurs ont voulu complaire à Sa Majesté. Ne
trouvez-vous pas que l’éclat de notre réputation littéraire en
serait grandement diminué ? Il vaut mieux dire au président et
aux examinateurs que nous sommes malades, et que nous ne
pouvons aller cette fois à la capitale pour le présent concours. De
cette manière, nous ôterons toute espérance aux personnes qui
avaient fixé leurs vues sur nous. Alors, nous nous rendrons
secrètement à la capitale, et nous attendrons l’époque du
concours. Dès que nous serons arrivés, nous entrerons de suite
dans l’arène : Si nous p.586 obtenons de nouveau les premiers
rangs 599 , nous pourrons alors marcher la tête haute et montrer
un légitime orgueil 600 . Nous n’aurons point perdu le fruit de nos
études.
A ces mots, Yên-pé-hân fut transporté de joie.
— Monsieur, lui dit-il, vos sages considérations me ravissent le
cœur. Seulement, il nous serait difficile de rester longtemps dans
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