les deux jeunes filles lettrées - Chine ancienne

Les deux jeunes filles lettrées
prier sa compagne de les composer pour moi ? Je ne m’étonne
plus si elle a dit, en se moquant de moi, que celui qui avait
composé à ma place était arrêté.
— Maintenant, dit Song-sîn, me voilà au fait. Je vous demanderai
comment elle s’y est prise pour vous faire composer des vers ?
— Dès que je fus entré, dit Tchang-în, Son Excellence Chân me
fit un excellent accueil et m’invita à boire un peu avec lui.
Quelque temps après, il ordonna aux domestiques de me
conduire dans une chambre basse du pavillon du pied de jade,
pour que je subisse mon examen. A peine venais-je de m’asseoir
que, par ordre de mademoiselle Chân, plusieurs de ses servantes
descendirent du pavillon et me demandèrent quel était l’auteur
des Nouvelles compositions de Tchang ? Je répondis que c’était
moi. Elle envoya encore ses servantes qui me dirent : « Si c’est
vous qui en êtes vraiment l’auteur, pourquoi y a-t-on mêlé des
vers de P’ing-jou-heng ? »
Cette question, qui me frappait juste à l’endroit vulnérable, me
mit dans l’impossibilité de répondre. Comme cette affaire avait
été arrangée secrètement entre nous deux, je me disais que les
démons et les esprits même ne pourraient la découvrir.
Comment donc l’ont-elles apprise sur-le-champ ?
— p.566 Cela est vraiment étrange, reprit Song-sîn d’un air
stupéfait : qu’avez-vous répondu ?
— J’avouai, dit Tchang-în, que c’étaient deux pièces de vers que
P’ing-jou-heng avait composées avec moi sur les mêmes rimes,
et que, pour cette raison, je les avais fait graver parmi les autres.
Voilà pourquoi elle a fait cette pièce pour me railler. Comme elle
voulait que je composasse des vers sur les rimes des siens, dans
mon embarras, je chargeai ce petit domestique d’aller vous prier
de composer à ma place. Mais sans m’en douter, je tombai dans
un piége, et je lui fis porter, au haut du pavillon, les vers que
cette demoiselle avait composés à ma place. A peine les eurent-
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