09.07.2015 Views

LE RECLASSEMENT PROFESSIONNEL SUITE AUX ... - E-Corpus

LE RECLASSEMENT PROFESSIONNEL SUITE AUX ... - E-Corpus

LE RECLASSEMENT PROFESSIONNEL SUITE AUX ... - E-Corpus

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

occupée. Plus le chômage est réduit et donc sélectif, plus la composition de la population enchômage a un caractère particulier. Mais, d’une part, cette composition n’apparaît pasimmédiatement et, d’autre part, ne tient pas à la sélection des chômeurs dans un secteur limitédes actifs, sur le plan démographique, professionnel ou autre. En effet, il y a parmi leschômeurs comme parmi les actifs des jeunes et des vieux, des femmes et des hommes, desmanœuvres et des ouvriers qualifiés. Les populations de chômeurs ne sont jamais composéesd’une ou de plusieurs parties spéciales de la population active. Ce ne sont jamais uniquementdes populations de jeunes ou de vieux, de femmes ou de manœuvres. La plupart des grandescatégories sont largement représentées, même lorsque le niveau du chômage est très bas etque les vieux travailleurs comme les travailleurs déficients sont nombreux parmi leschômeurs. C’est que le trait sociologiquement caractéristique des populations de chômeurs,dès que l’on s’écarte du chômage de grande récession, est l’infériorité, d’un niveau moyenplus ou moins marqué. Il y a des jeunes, des gens valides, des hommes, des cadres et destravailleurs qualifiés, mais tel chômeur de vingt-cinq ans est un déficient, tel cadre a plus decinquante ans, tel homme valide est un manœuvre. En période de bas chômage, une fortefraction des chômeurs cumule plusieurs traits d’infériorité. Cela explique que les populationsde chômeurs se distinguent surtout les unes des autres en fonction des types dominants.Les populations de chômeurs ne peuvent donc présenter toute la mêmecohésion sociale. Leur unité collective est très variable. Toutefois, ces variations laissentapparaître quelques grandes formes typiques de groupement, en relation avec la compositiondes populations de chômeurs et le type de chômage.Les populations de chômeurs tendent à former des groupements lorsque lechômage se situe à un niveau assez élevé, soit en raison d’une récession durable et profonde,soit parce qu’il existe un chômage de réserve important. Les types dominants ne présententpas une infériorité marquée; ce ne sont pas des chômeurs chroniques et des marginaux, maisdes sujets qui possédaient avant leur licenciement un emploi stable et qui sont pour une bonnepart des hommes valides, assez jeunes, connaissant un métier. Peu différents des salariés quiont gardé un emploi, ils se trouvent pourtant brusquement placés dans une situation toutedifférente. Ils se sentent victimes de conditions extérieures et se jugent touchés injustement.Comme leur chômage est relativement de longue durée – il y a peu de chômeurs de transitionparmi eux –, ils ont spontanément tendance à reconnaître les liens qui les unissent les uns auxautres. Placés dans une situation commune, tant sur le plan du statut social que sur celui desconditions de vie, ils prennent conscience de leurs intérêts communs, entreprennent souventdes actions communes et en arrivent même parfois à former des organisations. Desphénomènes de ce genre se sont produits assez fréquemment: aux États-Unis, pendant la crisede 1875-1880 et la crise de 1929, en Angleterre au cours de la dépression de 1884-1887, dansdivers pays européens en 1907, 1930-1933, en France au cours des événements de mai 1968.Les chômeurs peuvent former un autre type de collectivité lorsqu’une localitétout entière est touchée directement ou indirectement. Ce fut le cas de la petite villeautrichienne de Marienthal où la seule entreprise industrielle avait dû fermer ses portes 229 . Leschômeurs ne forment pas alors un groupe à part, si ce n’est par rapport à la collectiviténationale. Il s’agit d’une communauté locale victime d’une catastrophe sociale. L’unité mêmedes sorts individuels ne permet pas le développement d’attitudes combatives affermissant lacohésion du groupe. Bien au contraire, la vie collective se relâche dans une communauté queses observateurs ont qualifiée de «lasse». Chaque fois qu’il existe une base écologique des229LAZARSFELD, P., JAHODA, M. et ZEISEL, H., Les chômeurs de Marienthal,Paris, Les Éditions de Minuit, 1981.189

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!