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LE RECLASSEMENT PROFESSIONNEL SUITE AUX ... - E-Corpus

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III. <strong>LE</strong> <strong>RECLASSEMENT</strong> DES SALARIESA - PREVENIR <strong>LE</strong>S LICENCIEMENTS ET RECLASSER <strong>LE</strong>SSALARIESLes mots « traumatisme » ou « drame humain » sont tabous. Ils font peur.Dominique CLAVIER 266 , psychologue du travail et psychanalyste, est responsable derecherche chez BPI, un spécialiste des reconversions. Il enseigne également à l’université deSherbrooke au Canada.La perte d’un emploi est douloureuse, un licenciement est toujours untraumatisme très violent quelles que soient les mesures, bonnes ou mauvaises, quiaccompagnent la sortie. Parfois, des années après l’évènement, les gens refusent encore d’enparler. Parce qu’ils n’ont pas seulement perdu un emploi - un emploi ça se retrouve- maisparce que le travail est notre colonne vertébrale. Il nous procure un revenu et des moyens deconsommer. Il fournit des repères de temps et de pensée. Il donne l’occasion de développerdes compétences, de manière régulière, permet des interactions sociales, implique des actionscollectives qui donnent le sentiment d’être utile à la société. Bref, il est la source de l’identité.Lorsqu’il disparaît, l’équilibre personnel est mis en péril. Le salarié licencié sesent abandonné, trahi. Combien de sacrifices n’a-t-il pas consenti pour son entreprise ?Comme pour une mère finalement, une mère abusive qui lui en demandait toujours plus maisqu’il vénérait et considérait, au fond de lui, comme immuable. En disparaissant, elle menacesa propre survie. Tant qu’il produisait quelque chose, il existait. Le jour où l’entreprise ferme,les angoisses de mort et de destruction reviennent. Le licenciement, c’est un peu comme unemort annoncée. Des chercheurs ont pu observer des réactions similaires chez des malades enphase terminale et des salariés tout juste licenciés. D’abord, ils sont en état de choc, commeparalysés. En même temps, ils sont soulagés. Quelque part, ils s’y attendaient. Ils se sententlibérés d’un poids mais incapables d’admettre ce qui leur arrive. Ils nient la réalité : « c’est uncauchemar, je vais me réveiller. Ils se sont trompés. » Qui peut accepter de perdre sa vie, sonhistoire, l’espoir ? Passée cette phase de déni, ils prennent peur et plongent dans une périodede suractivité, on appelle cela la phase maniaque : on veut se prouver qu’on existe toujours.Ils veulent faire leur CV, retrouver un emploi, vite. C’est à ce moment que la personne vienttous les jours à la cellule de reclassement et en repart submergée d’informations. Mais cen’est pas ce qu’elle demande en réalité, c’est une manière d’appeler au secours. Or souventles consultants ne sont pas qualifiés pour réagir face à cette détresse. Puis vient la dépression,la personne craque, culpabilise : « je n’aurais pas dû rester, j’aurais pu le prévoir, j’aurais pul’éviter. »Ce processus correspond au travail de deuil indispensable. Pourquoi n’y a-t-ilpas d’accompagnement psychologique prévu ? Le sujet, comme les mots mis dessus sonttabou, ils ne sont jamais prononcés. L’entreprise estime qu’elle n’est pas là pour réparer lesdégâts psychologiques. « Quelques-unes commencent à s’en soucier, quelques cabinets dereclassement, comme le notre, prévoient une prise en charge psychologique des victimes delicenciement 267 . La plupart du temps, le salarié doit faire ce travail seul. Si un traumatisme266Dominique CLAVIER, Psychologie du travail et nouveaux milieux dutravail, Presses de l’Université du Québec, 2005.267CLAVIER, D, Le licenciement, une mort annoncée, Libération-spécialEmploi, 25 septembre 2000.455

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