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LE RECLASSEMENT PROFESSIONNEL SUITE AUX ... - E-Corpus

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lorsqu’elle l’était (travail non robotisé), c’était la règle de l’augmentation collective quiprévalait. En outre, les salariés ont souvent la conviction que cette individualisation prélude àdes licenciements, les moins bons devenant les victimes désignées en cas de compressiond’effectifs. Enfin, l’individualisation peut provoquer, au sein du collectif de travail, destensions génératrices d’inefficacité. Pour toutes ces raisons, l’individualisation desaugmentations de salaires n’est pas encore généralisée. Reste qu’elle progresse sensiblement,devenant peu à peu la norme dominante pour l’ensemble des salariés (sauf dansl’administration). L’individualisation, en effet, fournit à l’entreprise un mode de régulationsalariale très souple, puisque la masse salariale peut désormais évoluer de façon trèsirrégulière d’une année à l’autre, en fonction des résultats de l’entreprise. Ces vertus deflexibilité ne sont pas contradictoires avec l’instauration d’un salaire d’efficience destiné àfixer la main-d’œuvre la plus performante et à inciter les salariés à ne pas tricher dans leurardeur au travail. Mais le revers de la médaille est évident: au sein même du groupe dessalariés, les écarts peuvent se creuser, et l’homogénéité salariale, le creuset où naissait lafameuse classe moyenne, est fortement compromise. Ainsi, à la fracture qui sépare intégrés,exclus et possesseurs d’un emploi précaire s’ajoute une dispersion croissante au sein de lapremière catégorie. Les inégalités qui se creusent ne sont donc pas seulement statutaires, ellessont également salariales.Cette évolution n’est évidemment pas inéluctable. L’exemple japonais nousmontre qu’une autre issue est envisageable: c’est l’économie du partage. Une partieimportante de la rémunération, dans ce cas, est constituée d’un intéressement aux résultats del’entreprise. Lorsque ceux-ci se dégradent, la rémunération des salariés est donc réduited’autant, puisque la partie variable est comprimée, voire annulée. Cette compression de lamasse salariale, à son tour, favorise l’adaptation de l’entreprise: elle a moins besoin derecourir aux licenciements. À l’inverse, ce mode de rémunération facilite les embauches: pourl’entreprise, le coût d’un salarié supplémentaire se limite à la partie fixe du salaire (et descharges sociales correspondantes) puisque, si ce nouvel embauché n’engendre aucun résultatsupplémentaire, la partie variable qu’il recevra sera prélevée sur celle des autres salariés, quirecevront un peu moins à ce titre. Et si le salarié supplémentaire contribue à augmenter lerésultat de l’entreprise, tout le monde y gagne: les salariés comme l’entreprise. Il ne fait pasde doute que ce mécanisme, théorisé par Martin WEITZMAN 116 a permis à l’économiejaponaise de maintenir un quasi plein-emploi, même lorsque le taux de croissance est devenuproche de zéro, dans la première partie de la décennie de 1990. Dans ce cas, la flexibilité n’estplus recherchée à un niveau individuel, elle est appliquée à un niveau collectif. Mais celasuppose, on s’en doute, un fort consensus entre salariés, puisque, de fait, les embauchesnouvelles font peser sur les salariés en place la menace d’une réduction de leur rémunération,si ces nouveaux salariés n’engendrent pas un résultat en hausse suffisante.Le «modèle japonais» renvoie ainsi à un contexte culturel spécifique, ce quiexplique peut-être qu’il n’ait pas tendance à se généraliser, malgré ses vertus. Plus proche denous, en Allemagne, se dessine un «nouveau contrat social» qui vise à réduire en partie lafracture entre les salariés et les exclus, ou ceux que l’exclusion menace: en liant lesnégociations sur les salaires avec le niveau d’emploi, le syndicalisme allemand se déclare prêtà négocier globalement, non pas en fonction des intérêts des seuls salariés en place, mais enfonction d’un niveau d’emploi désiré. On voit bien, dans ce cas, les termes du contrat:modération salariale en échange de garanties sur l’emploi et sur l’embauche. Mais il est clairqu’une telle négociation implique deux conditions. La première concerne les entreprises ellesmêmes:dans une économie de marché, seuls de très grands groupes, ou des branches entières116WEITZMAN Martin, L’économie du partage, Ed. Lattès, 1985.62

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