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Péquod

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mes protestations restant sans effet, je fus contraint de céder et,<br />

en conséquence, je me préparai à prendre l’affaire en main avec<br />

une hâte décidée, une énergie vigoureuse, propre à bâcler<br />

promptement cette question futile. Le lendemain matin de<br />

bonne heure, je quittai Queequeg enfermé avec Yoyo dans notre<br />

petite chambre, car il semblait que ce fût le jour d’une espèce de<br />

carême ou de ramadan, ou un jour de jeûne, de mortification et<br />

de prières entre Queequeg et Yoyo. Ce qu’il en était précisément,<br />

je ne pus jamais le découvrir car bien que je me sois appliqué<br />

maintes fois à méditer sa liturgie et ses XXXIX Articles,<br />

je ne pus jamais en venir à bout ; dès lors, abandonnant Queequeg<br />

jeûnant avec son tomahawk, et Yoyo se chauffant au feu<br />

sacrificatoire des copeaux, je me mis en route parmi les bateaux.<br />

Après des déambulations interminables, des renseignements<br />

demandés à tort et à travers, j’appris que trois navires étaient en<br />

partance pour des voyages de trois ans : le Diable-et-sa-mère, la<br />

Bonne-Bouche et le <strong>Péquod</strong>. J’ignore l’origine du nom du Diable-et-sa-mère,<br />

celle de Bonne Bouche est évidente, quant à <strong>Péquod</strong>,<br />

vous vous souvenez sans doute que c’était le nom d’une<br />

célèbre tribu d’Indiens du Massachussetts aussi éteinte à présent<br />

que les anciens Mèdes. Je jetai un regard inquisiteur et fureteur<br />

sur l eDiable-et-sa-mère ; de là, je sautai dans la Bonne-<br />

Bouche et enfin, montant à bord du <strong>Péquod</strong>, je l’examinai un<br />

moment et décidai que c’était là le navire idéal pour nous.<br />

Autant que je sache, vous avez sans doute vu, au cours de<br />

votre vie, bien des embarcations pittoresques : des lougres à<br />

bouts carrés, des jonques japonaises hautes comme des montagnes,<br />

des galiotes-caisses à beurre, je ne sais quoi encore mais,<br />

croyez-moi sur parole, vous n’avez jamais vu un vieux bâtiment<br />

aussi extraordinaire que cet extraordinaire vieux <strong>Péquod</strong>. C’était<br />

un navire de la vieille école, plutôt petit, qui avait la façon surannée<br />

des meubles à pieds de griffon. Longuement amarinée,<br />

colorée par tous les temps, des typhons aux calmes plats des<br />

quatre océans, sa vieille coque avait pris le teint basané d’un<br />

grenadier français qui aurait combattu en Égypte comme en<br />

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