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Péquod

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sions mêmes se répétant, la terreur primordiale inhérente à la<br />

mer s’est émoussée au cœur de l’homme.<br />

Le premier navire dont nous parle l’histoire flotta sur un<br />

Océan dont la vengeance engloutit un univers entier sans même<br />

laisser une veuve. C’est le même Océan qui roule maintenant ses<br />

flots, c’est lui qui a détruit les vaisseaux naufragés de l’année<br />

précédente. Oui, mortels inconséquents, le déluge de Noé ne<br />

s’est pas encore asséché, il couvre encore les deux tiers de la<br />

douce terre.<br />

En quoi la mer diffère-t-elle donc de la terre pour qu’un<br />

miracle sur l’une n’en soit point un sur l’autre ? Une terreur sacrée<br />

envahit les Hébreux lorsque la terre vivante s’ouvrit sous<br />

les pieds de Korah et de ses hommes, les engloutissant à jamais<br />

et pourtant le soleil pas un jour ne se lève que la mer vivante<br />

n’avale de la même manière navires et équipages.<br />

Non seulement la mer est l’ennemie de cet homme qui lui<br />

est étranger mais encore elle est démoniaque envers ses propres<br />

enfants, plus fourbe que l’hôte persan qui assassine ses invités,<br />

n’épargnant pas ceux qu’elle a engendrés. Comme une tigresse<br />

sauvage étouffe en se retournant ses propres enfants, la mer<br />

jette aux rochers de la côte les plus puissantes baleines et les<br />

abandonne flanc à flanc avec les épaves des navires naufragés.<br />

Point de miséricorde, elle ne connaît d’autre maître que sa propre<br />

puissance. Haletant et renâclant comme un destrier affolé<br />

qui a perdu son cavalier, le libre Océan galope autour du globe.<br />

Songez à la ruse de la mer et à la manière dont ses créatures<br />

les plus redoutables glissent sous l’eau, à peu près invisibles,<br />

traîtreusement cachée par les plus suaves tons d’azur. Songez à<br />

la beauté et à l’éclat satanique de ses plus impitoyables tribus, à<br />

la forme exquise de certains requins. Songez au cannibalisme<br />

universel qui règne dans la mer où les créatures de proie<br />

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