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Péquod

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– J’avais cru, sir, que vous aviez parlé au charpentier.<br />

– Au charpentier ? comment… mais non. Je dirai charpentier,<br />

que tu as là un travail très propre, extrêmement distingué…<br />

ou bien préférerais-tu travailler l’argile ?<br />

– Sir ? l’argile ? l’argile, sir ? C’est de la boue, nous la laissons<br />

aux cureurs de fossés.<br />

– Le gaillard blasphème ! Qu’as-tu à éternuer ?<br />

– L’os est plutôt poussiéreux, sir.<br />

– Prends-en de la graine, alors. Et quand tu seras mort, ne<br />

mets jamais ta dépouille sous le nez des vivants.<br />

– Sir ? oh ! ah !… je pense bien… oui… oh ! mon Dieu…<br />

– Écoute, charpentier, j’ose croire que tu te dis un bon ouvrier<br />

digne de son travail, n’est-ce pas ? Eh bien ce qui parlera<br />

en ta faveur, c’est que je continue à sentir une autre jambe là où<br />

tu auras ajusté celle que tu fais, c’est-à-dire, charpentier ma<br />

vieille jambe perdue de chair et de sang, veux-je dire. Ne peuxtu<br />

pas chasser le vieil Adam ?<br />

– En vérité, sir, je commence à y comprendre quelque<br />

chose. Oui, j’ai entendu dire des choses curieuses à ce sujet,<br />

sir… et comment un homme démâté ne perd jamais entièrement<br />

le sentiment de son vieil espar, mais qu’il y sentira des picotements<br />

parfois. Puis-je humblement vous demander s’il en est<br />

ainsi, sir ?<br />

– Il en est bien ainsi, homme. Tiens, mets ta jambe vivante<br />

là où autrefois se trouvait la mienne. Et maintenant l’œil n’y voit<br />

qu’une jambe, deux en voit l’âme toutefois. Là où tu sens vibrer<br />

– 643 –

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