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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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— ... Lâche ma manche, ordonna-t-il.<br />

— Non, je ne veux pas ! Tu m’as menti, n’est-ce pas ?<br />

— Quand donc t’ai-je menti ?<br />

— Au col. Tu as promis de m’emmener avec toi.<br />

— Il y a de cela une éternité. Je n’y songeais pas vraiment<br />

alors non plus, <strong>et</strong> je n’avais pas <strong>le</strong> temps de t’expliquer. Qui plus<br />

est, l’idée n’était pas de moi, mais de toi. J’avais hâte de partir,<br />

<strong>et</strong> tu ne voulais pas me laisser al<strong>le</strong>r avant d’avoir ma promesse.<br />

J’ai accepté parce que je n’avais pas <strong>le</strong> choix.<br />

— Non, non <strong>et</strong> non ! Tu ne dis pas la vérité, n’est-ce pas ?<br />

cria-t-el<strong>le</strong> en l’immobilisant contre <strong>le</strong> parap<strong>et</strong> du pont.<br />

— Lâche-moi ! On nous regarde.<br />

— Ça m’est égal ! Quand tu étais ligoté dans l’arbre, je t’ai<br />

demandé si tu voulais mon aide. Tu étais si heureux que tu m’as<br />

dit par deux fois de couper la corde. Tu ne <strong>le</strong> nies pas, hein ?<br />

El<strong>le</strong> essayait d’être logique en son argumentation mais ses<br />

larmes la trahirent. D’abord abandonnée toute p<strong>et</strong>ite, puis<br />

plantée là par son fiancé, <strong>et</strong> maintenant ceci. Musashi, sachant<br />

comme el<strong>le</strong> était seu<strong>le</strong> au monde <strong>et</strong> très attaché à el<strong>le</strong>, ne savait<br />

que répondre, bien qu’il fût extérieurement plus calme.<br />

— Lâche-moi ! répéta-t-il d’un ton sans réplique. Il fait p<strong>le</strong>in<br />

jour, <strong>et</strong> l’on nous regarde. Veux-tu donc nous donner en<br />

spectac<strong>le</strong> ?<br />

El<strong>le</strong> lâcha sa manche <strong>et</strong> s’effondra en sanglotant contre <strong>le</strong><br />

parap<strong>et</strong>, ses cheveux lustrés lui tombant sur <strong>le</strong> visage.<br />

— Pardon, murmura-t-el<strong>le</strong>. Je n’aurais pas dû te dire tout<br />

cela. Je t’en prie, oublie-<strong>le</strong>. Tu ne me dois rien.<br />

Penché sur el<strong>le</strong>, écartant des deux mains ses cheveux de son<br />

visage, il la regarda dans <strong>le</strong>s yeux.<br />

— Otsū, lui dit-il avec tendresse, durant tout ce temps où tu<br />

m’attendais, jusqu’à aujourd’hui même, j’ai été enfermé dans <strong>le</strong><br />

donjon du château. Voilà trois ans que je n’ai pas vu <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il.<br />

— Oui, je l’ai entendu dire.<br />

— Tu savais ?<br />

— Takuan me l’a dit.<br />

— Takuan ? Il t’a tout dit ?<br />

— Je <strong>le</strong> crois. Je me suis évanouie au fond d’un ravin près de<br />

la maison de thé Mikazuki. Je fuyais Osugi <strong>et</strong> l’onc<strong>le</strong> Gon.<br />

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