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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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plaisirs de Kō<strong>et</strong>su. <strong>La</strong> tête inclinée, pensive, il s’avança en<br />

si<strong>le</strong>nce vers la lisière du champ.<br />

Trop de Kojirōs<br />

Dans <strong>le</strong> p<strong>et</strong>it débit de boisson, aux abords de la grand-vil<strong>le</strong>,<br />

l’odeur du bois qui brûlait <strong>et</strong> de la nourriture en train de cuire<br />

emplissait l’air. Ce n’était qu’une cabane : pas de plancher, un<br />

tréteau en guise de tab<strong>le</strong> <strong>et</strong> quelques tabour<strong>et</strong>s disséminés<br />

autour. Dehors, <strong>le</strong>s dernières lueurs du couchant donnaient<br />

l’impression qu’un bâtiment éloigné brûlait, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s corbeaux qui<br />

tournoyaient autour de la pagode de Tōji ressemblaient à des<br />

cendres noires qui s’envolaient des flammes.<br />

Trois ou quatre boutiquiers <strong>et</strong> un moine itinérant se<br />

trouvaient assis à la tab<strong>le</strong> de fortune, tandis que dans un coin<br />

plusieurs ouvriers jouaient pour boire. Le toton qu’ils faisaient<br />

tourner était une pièce de cuivre avec un morceau de bois<br />

enfoncé en travers du trou central.<br />

— Yoshioka Seijūrō s’est vraiment mis dans de beaux draps,<br />

c<strong>et</strong>te fois ! dit l’un des boutiquiers. Et j’en connais un qui ne se<br />

sent plus de joie ! Ça s’arrose !<br />

— Je vais boire pour célébrer ça, dit un autre.<br />

— Encore du saké ! cria un autre au patron.<br />

Les boutiquiers buvaient à un rythme rapide <strong>et</strong> régulier. Peu<br />

à peu, seu<strong>le</strong> une faib<strong>le</strong> clarté borda <strong>le</strong> rideau du cabar<strong>et</strong>, <strong>et</strong> l’un<br />

d’eux brailla :<br />

— Je ne vois pas si je lève ma coupe à mon nez ou à ma<br />

bouche, tant il fait sombre ici ! Lumière !<br />

— Une minute. Je m’en occupe, dit <strong>le</strong> patron d’un ton las.<br />

Bientôt, des flammes jaillirent du four en terre ouvert. Plus<br />

il faisait noir au-dehors, plus rouge était <strong>le</strong> feu.<br />

— J’enrage en y pensant, dit <strong>le</strong> premier. L’argent que ces<br />

gens-là me devaient pour du poisson <strong>et</strong> du charbon de bois !...<br />

Ça montait à une somme rondel<strong>et</strong>te, c’est moi qui vous <strong>le</strong> dis.<br />

Regardez seu<strong>le</strong>ment la dimension de l’éco<strong>le</strong> ! Je m’étais juré de<br />

me faire payer à la fin de l’année, <strong>et</strong> qu’est-ce qui est arrivé<br />

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