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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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— De quel « jeune démon » vou<strong>le</strong>z-vous par<strong>le</strong>r ? demanda<br />

Ogin en se contenant visib<strong>le</strong>ment.<br />

Pareil<strong>le</strong> au caméléon, Osugi changea de tactique :<br />

— Ma langue a fourché, je vous l’assure, dit-el<strong>le</strong> en riant.<br />

Les gens du village l’appel<strong>le</strong>nt ainsi ; je <strong>le</strong>s aurai imités. Le<br />

« jeune démon », c’est Takezō. Il se cache ici, hein ?<br />

— Mon Dieu, non, répondit Ogin avec un étonnement<br />

sincère. Gênée d’entendre son frère traité de la sorte, el<strong>le</strong> se<br />

mordit la lèvre.<br />

Otsū, la prenant en pitié, lui expliqua qu’el<strong>le</strong> avait reconnu<br />

Takezō à la fête. Puis, pour essayer de l’apaiser, el<strong>le</strong> ajouta :<br />

— Curieux, n’est-ce pas, qu’il ne soit pas venu droit ici ?<br />

— C’est pourtant <strong>le</strong> cas, dit Ogin. J’ignorais tout de cela.<br />

Mais s’il est de r<strong>et</strong>our, comme vous <strong>le</strong> dites, je suis sûre qu’il va<br />

frapper à la porte d’un moment à l’autre.<br />

Osugi, cérémonieusement assise à terre sur <strong>le</strong> coussin, <strong>le</strong>s<br />

jambes bien reployées sous el<strong>le</strong>, croisa <strong>le</strong>s mains dans son giron,<br />

<strong>et</strong>, avec une expression de bel<strong>le</strong>-mère outragée, se lança dans<br />

une tirade :<br />

— Qu’entends-je ? Espérez-vous me faire croire que vous<br />

n’avez pas encore de ses nouvel<strong>le</strong>s ? Ne comprenez-vous pas que<br />

je suis la mère dont votre jeune vaurien a entraîné <strong>le</strong> fils à la<br />

guerre ? Ignorez-vous que Matahachi est l’héritier <strong>et</strong> <strong>le</strong> membre<br />

<strong>le</strong> plus important de la famil<strong>le</strong> Hon’iden ? C’est votre frère qui a<br />

persuadé mon fils d’al<strong>le</strong>r se faire tuer. Si mon fils est mort, c’est<br />

votre frère qui l’a tué, <strong>et</strong> s’il croit pouvoir impunément rentrer<br />

seul en rasant <strong>le</strong>s murs...<br />

<strong>La</strong> vieil<strong>le</strong> femme s’arrêta juste assez pour reprendre ha<strong>le</strong>ine,<br />

<strong>et</strong> ses yeux se remirent à étince<strong>le</strong>r de rage :<br />

— ... Et vous ? Puisqu’il saute aux yeux qu’il a eu l’indécence<br />

de rentrer seul, pourquoi vous, sa sœur aînée, ne me l’avez-vous<br />

pas envoyé aussitôt ? Vous me dégoûtez l’un <strong>et</strong> l’autre, à traiter<br />

une vieil<strong>le</strong> femme avec un pareil irrespect. Pour qui me prenezvous<br />

?<br />

Ayant de nouveau repris son souff<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> continua de<br />

tempêter :<br />

— ... Si votre Takezō est de r<strong>et</strong>our, alors, ramenez-moi mon<br />

Matahachi. Si vous en êtes incapab<strong>le</strong>, <strong>le</strong> moins que vous puissiez<br />

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